Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/170

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pas examiner les difficultés que présente la survivance forcée de l’âme des bêtes ni surtout les objections terribles que les expériences de la physiologie ont précisées et accumulées depuis trente ans.

Puisque nous n’avons d’autre but que de produire la perfection morale, nous dirons qu’il n’y a d’autre beauté que la beauté morale, et que l’objet de l’art est de l’exprimer. L’art ainsi défini deviendra un auxiliaire de l’éloquence, et l’artiste devra se considérer comme un maître de vertu. Nous appliquerons cette règle aux diverses écoles, et nous avancerons cette conséquence ridicule que Lesueur et Poussin « égalent ou surpassent » Murillo, Gorrége, le Titien, Rembrandt et Rubens.

Cette morale qui vient de produire toute notre philosophie, nous allons la fonder sur la distinction populaire du juste et de l’injuste. Nous nous garderons bien de l’établir à la façon des psychologues, en exposant le mécanisme forcé de nos sentiments, ou à la façon des métaphysiciens, en découvrant la définition du Bien. Nous l’exposerons en orateurs, en citant le sens commun, et en racontant ce qui se passe dans le cœur d’un honnête homme. Si nous avons besoin de quelque formule rigoureuse, nous irons à Kœnigsberg et nous emprunterons celle de Kant. Telle est cette philosophie ; le besoin oratoire