Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/220

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Dieu. Il ne sort jamais du ton imposant, et il peut entrer quand il veut dans le sublime. M. Cousin étudia la théologie et la prédication, et passa quatre ans au séminaire.

Pendant ces fortes études, il fut admis, grâce à sa réputation naissante et à son caractère sacré, dans la société des femmes et des hommes les plus nobles et les plus polis du siècle. Il connut Mme de Sévigné, Mme de la Fayette, Mme de Sablé, et il entrevit une fois Mme de Longueville. Cette angélique figure resta gravée dans sa mémoire, dans son cœur peut-être, et le souvenir de la charmante et touchante princesse, épuré par la vue de sa piété parfaite et de sa pénitence héroïque, lui servit plus tard, lorsque du haut de la chaire il peignait la beauté et la pureté des anges, et emportait avec lui ses auditeurs attendris dans le ciel. Il apprit, en écoutant le langage exquis des gens de cour et des gens du monde, la différence du style enflé et du style noble, du style vague et du style élevé ; il se dépouilla d’une certaine rouille philosophique qu’il avait contractée en théologie, et comprit que, lorsqu’on faisait le portrait de personnes si élégantes et si mondaines, il ne fallait pas y apporter les habitudes philosophiques que la Sorbonne conservait dans ses argumentations d’apparat. Lorsque plus tard il écrivit, il se figurait toujours qu’il avait pour auditeurs ces esprits si délicats, si en-