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sur la mort de madame la duchesse de Beaufort :

J’ai vu passer par ma fenêtre
Les six péchés mortels vivants,
Conduits par le bastard d’un prêtre[1],
Qui tous ensemble alloient chantant
  Un requiescat in pace,
Pour le septième trépassé[2].

Henri IV, à ce qu’on prétend, n’en avoit pas eu les

  1. Balagny, fils de Montluc, évêque de Valence. Il vint avec cinq cents chevaux et huit cents fantassins levés à ses dépens, trouver Henri IV, lorsqu’il ne savoit comment s’opposer au grand commandeur de Castille et à M. de Mayenne, qui venoient pour faire lever le siége de Laon. Ce service fut si agréable au roi, qu’il fit Balagny maréchal de France, et lui fit épouser la sœur de madame de Beaufort. Ce Balagny avoit été prince de Cambray, dont il s’étoit rendu maître en suivant le duc d’Alençon. Sa première femme, la sœur du brave Bussy d’Amboise, avoit tant de cœur, qu’elle creva de dépit de n’être plus la princesse de Cambray, où ils faisoient grande dépense. Elle eut un fils qui fut le Bouteville de son temps ; Puymorin le tua dans la rue des Petits-Champs. Il est vrai qu’un valet le blessa par-derrière d’un coup de fourche, comme il se battoit. Le Balagny qui est venu de la sœur de madame d’Estrées n’est qu’un coquin. (T.)
  2. On conte encore une chose fort jolie de cette madame de Neufvic. Quoique déjà assez âgée, elle aimoit fort les fleurs, et portoit souvent des bouquets. Le comte de Sardini, alors jeune, la trouva un jour chez madame de Bar, avec un bouquet ; c’étoit durant le siége d’Amiens. Il se mit à chanter ce couplet de Ronsard :

      Quand ce beau printemps je voy,
       J’aperçoy
      Rajeunir la terre et l’onde,
      Et me semble que l’amour,
       En ce jour,
      Comme enfant renaisse au monde.


    Elle, sur-le-champ, se mit à chanter :

      Moi je fais comparaison
       D’un oison
      À un homme malhabile,
      Qui, d’un sang par trop rassis,
       Cause assis,
      Quand son roi prend une ville. (T.)