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quand il fit cette pièce à M. Du Perrier, qui commence :

Ta douleur, Du Perrier, sera donc éternelle.

Ses premiers vers étoient pitoyables ; j’en ai vu quelques-uns, et entre autres une élégie qui débute ainsi :

Doncque tu ne vis plus, Généric fut, et la mort
En l’avril de tes ans te montre son effort, etc.

Il n’avoit pas beaucoup de génie ; la méditation et l’art l’ont fait poète. Il lui falloit du temps pour mettre une pièce en état de paroître. On dit qu’il fut trois ans à faire l’Ode pour le premier président de Verdun, sur la mort de sa femme[1], et que le président étoit remarié, avant que Malherbe lui eût donné ces vers.

Balzac dit en une de ses lettres que Malherbe disoit que quand on avoit fait cent vers ou deux feuilles de prose, il falloit se reposer dix ans. Il dit aussi que le bon homme barbouilla une demi-rame de papier pour corriger une seule stance. C’est une de celles de l’Ode à M. de Bellegarde ; elle commence ainsi :

Comme en cueillant une guirlande
L’homme est d’autant plus travaillé, etc.[2].

Le Roi se ressouvint de ce que le cardinal du Perron

  1. Voyez les stances à M. le premier président de Verdun pour le consoler de la mort de sa première femme. (Poésies de Malherbe, Paris, Barbou, 1764, in-8o, pag. 239.)
  2. Elle fut composée en 1608. Voyez cette ode, pag. 103 du volume précité. La strophe dont les deux premiers vers sont rappelés ici est la cinquième dans l’édition de Barbou.