Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/206

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la ville[1]. Ce monsieur de la rue Aubry-Boucher étoit un original. Il prit à cet homme une grande amitié pour madame de Rambouillet, mais celle qu’il avoit pour mademoiselle Paulet se pouvoit appeler amour. À l’entrée qu’on fit au feu Roi, au retour de La Rochelle, il s’avisa, car il étoit capitaine de son quartier, d’habiller tous ses soldats de vert, parce que c’étoit la couleur de la belle. Tous ses verts-galants firent une salve devant la maison où elle étoit avec madame de Rambouillet, madame de Clermont et d’autres. La Lionne, qui ne prenoit pas plaisir à être aimée de cet animal-là, en rugit une bonne heure. Cependant il se fallut apaiser et aller avec ces dames au jardin du galant, dans le faubourg Saint-Victor, où il leur donna la collation. Sa femme vint à mourir ; il se remaria avec une personne qu’il voulut à toute force, parce qu’elle avoit de l’air de mademoiselle Paulet. À soixante ans il alla par dévotion à Rome. Si la Lionne eût été encore au monde quand la fille de cet homme fit tant l’acariâtre contre madame de Saint-Étienne[2], comme elle l’auroit dévorée[3] !

J’oubliois une galanterie que madame de Ram-

  1. Saint-Brisson Séguier, un gros dada qui tous les matins demandoit l’avoine : son valet de chambre s’appeloit ainsi. Il y avoit un vaudeville :

    Et le gros Saint-Brisson
    Dépense plus en son
    Que Guillaume en farine. (T.)

  2. L’abbesse de Saint-Étienne de Reims étoit une demoiselle d’Angennes. (Voyez plus loin son article à la suite de celui de madame de Rambouillet, sa mère.)
  3. Voyez, sur une pièce de vers intitulée le Récit de la Lionne, une note de l’article Chapelain dans le volume suivant.