Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/263

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C’étoit un vieux débauché, tout pourri de v..... ; d’une piqûre d’épingle on lui faisoit venir un ulcère. Jamais je ne vis un si grand brutal. Une fois, pour ne pas perdre une médecine qu’il avoit préparée pour un cheval de carrosse qui n’en eut pas besoin, il la prit et en pensa crever. Cet homme avoit un valet qui tenoit académie de jeu. C’est le privilége des écuyers des ambassadeurs. Ce valet fit quelque chose. Le barisel[1] le prit, il fut condamné aux galères. Comme on l’y menoit avec beaucoup d’autres, Le Rouvray, avec un valet-de-chambre du maréchal, n’ayant chacun qu’un fusil et leurs épées, mettent en fuite vingt-cinq ou trente sbires, qui avoient chacun deux ou trois coups à tirer, car ils ont, outre leur carabine, des pistolets à leurs ceintures, et outre cela ils sont munis de bonnes jacques de maille. Le Rouvray, victorieux, met tous les forçats en liberté. Voilà un grand affront aux Barberins. Le maréchal fait sauver son homme, et lui donne, pour le garder à la campagne, huit ou dix soldats françois des troupes des Vénitiens, car il eut peur qu’on ne lui fît chez lui quelque violence. Les Barberins emploient un célèbre bandit, nommé Julio Pezzola, qui met des gens aux environs du lieu où étoit Le Rouvray : je pense que c’étoit sur les terres du duc de Parme, à Caprarole ou à Castro. Le Rouvray, comme il étoit fort brutal, s’évade et s’en va à la chasse sans ses soldats.

Les bandits ne le manquent point, et de derrière

  1. Le barisel, en italien barigello, est un officier chargé de veiller à la sûreté publique et d’arrêter les malfaiteurs. Il est le chef des sbires. Ses fonctions correspondent à celle que le chevalier-du-guet remplissait autrefois à Paris.