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galanteries, et madame de Gironde fut contrainte de se retirer à Reniez. Par malheur pour elle, un avocat du présidial de Montauban, nommé Crimel, se retira dans le village de Reniez. Cet homme étoit méchant, mais il avoit de l’esprit. Il fut bientôt familier avec madame de Gironde, qui en temps de peste ne pouvoit pas avoir beaucoup de compagnie ; et comme elle se plaignit à lui de son mariage, on dit qu’il lui mit dans la tête qu’elle se pouvoit démarier, et que l’espérance qu’il lui en donna la charma, de sorte que, pour le récompenser d’un si bon avis, elle lui donna tout ce que peut donner une dame.

La peste ayant cessé, elle revint à Montauban, où elle fut plus admirée et plus cajolée que jamais. Le marquis de Flamarens, le baron d’Aubais, le vicomte de Montpeiroux, et plusieurs autres gentilshommes de qualité, y accoururent et y demeurèrent long-temps pour l’amour d’elle. Ce fut alors qu’un de ces messieurs lui ayant donné les violons, comme il n’y avoit point de lieu commode chez elle, elle alla d’autorité, avec toute cette noblesse, se mettre en possession de la salle d’un des principaux de Montauban, quoiqu’il la lui eût refusée, en disant pour toutes raisons que cet homme lui avoit bien de l’obligation, et qu’elle faisoit tout ce qu’elle pouvoit pour le rendre honnête homme.

Cependant l’envie de se démarier s’accroissoit de jour en jour. Pour cela elle s’avise, pour n’être plus sous la puissance de son mari, de proposer à Gironde de la laisser aller voir ses oncles maternels pour leur demander qu’ils lui fissent raison des droits que sa mère avoit sur la maison de Panat. Elle y fut, et Ca-