Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/341

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le dit à sa maîtresse. La femme dit : « Il faut l’attraper. Dans quelque temps faites semblant de consentir et lui donnez un rendez-vous. » Or, il arriva que le propre soir que Saint-Léger avoit rendez-vous de cette fille, un de ses meilleurs amis vient chez lui. Pour s’en défaire, il le mène coucher bien plus tôt que de coutume. L’ami en a du soupçon, veut savoir ce que c’est ; il le lui avoue. Ce gentilhomme lui en fait honte, et lui persuade de lui donner sa place ; il va au rendez-vous au lieu de Saint-Léger. Il y trouve la femme de son ami, qui, pour se moquer de son mari, avoit joué tout ce jeu-là. Il fait ce pourquoi il étoit venu. Elle a conté depuis que, de peur de rire, elle se mordoit les lèvres. C’étoit dans un jardin, et il ne faisoit point clair de lune. L’ami revient bien satisfait, et le mari se couche auprès de sa femme. Le récit que lui avoit fait son ami lui avoit fait venir l’eau à la bouche ; il veut en passer son envie. Sa femme lui dit en riant : « Seigneur Dieu ! vous êtes de belle humeur ce soir. — Que voulez-vous dire ? lui dit-il. — Eh ! répondit-elle, ne vous souvenez-vous plus du jardin ? » Le pauvre homme devina incontinent ce que c’étoit. Il ne fit semblant de rien ; mais il en fut si saisi, qu’il en mourut. Elle, depuis, a été fort abandonnée et est morte de la v......