Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/346

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Le comte de Cramail avoit un ami qu’on appeloit Lioterais, homme d’esprit. Quand il fut vieux, et que la vie commença à lui être à charge, il fut six mois à délibérer tout ouvertement de quelle mort il se feroit mourir ; et un beau matin, en lisant Sénèque, il se donne un coup de rasoir et se coupe la gorge. Il tombe ; sa garce monte au bruit : « Ah ! dit-elle, on dira que je vous ai tué. » Il y avoit du papier et de l’encre sur la table, il prend une plume et écrit : « C’est moi qui me suis tué, » et signe Lioterais.




NAINS, NAINES.


L’infante Claire-Eugénie envoya une naine à la Reine dans une cage. Le gentilhomme qui la lui présenta dit que c’étoit un perroquet, et offrit à la Reine, pourvu qu’on n’ôtât point la couverture, de peur de l’effaroucher, de lui faire faire par ce perroquet un compliment en cinq ou six langues différentes. En effet, elle en fit un en espagnol, en italien, en françois, en anglois et en hollandois. On dit aussitôt : « Ça ne sauroit être un perroquet. » Il ôta la couverture et on trouva la naine. Elle crut assez pour être une fort petite femme, et on la maria à un assez grand homme, nommé Lavau, Irlandois, qui étoit à la Reine. Elle fut femme-de-chambre et mourut au bout de quelques années en mal d’enfant.

Mademoiselle a eu une naine qui étoit la plus petite