Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/390

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il feignit une apparition. Mais le cardinal de Richelieu s’en moqua[1]. M. de Bouillon, après cela, fit une paix de pair à pair avec le Roi. Le cardinal, en achevant le traité, dit : « Il y a encore une condition à ajouter, c’est que M. de Bouillon croira que je suis son très-humble serviteur. » Après cela, M. de Bouillon se va sottement engager avec M. d’Orléans et M. Le Grand. Son père lui avoit tant recommandé de se tenir dans son petit corps-de-garde, et il va cabaler quand il commande en Piémont. On le prit à la tête de son armée, et sa femme fut contrainte de rendre Sédan pour lui sauver la vie. Il ne témoigna pas grande constance dans la prison.

Le cardinal, mal informé de la disposition où étoient les Catalans, leur donna la carte blanche au lieu qu’eux la lui eussent donnée ; car ils étoient résolus d’appeler le Turc, s’il faut ainsi dire, plutôt que se soumettre à l’Espagne. Cette faute a horriblement coûté à la France, car la Catalogne a tiré bien de l’argent. On a payé tout comme dans une hôtellerie, et cette principauté, par conséquent l’Espagne, s’enrichissoit à nos dépens.

Le cardinal étoit rude à ses gens, et toujours en mauvaise humeur ; il a, dit-on, frappé quelquefois Cavoye, son capitaine des gardes, et autres, transporté de colère. On raconte que le Mazarin en a fait autant à Noailles quand celui-ci étoit son capitaine des gardes.

  1. Cela me fait souvenir d’un savant médecin de la Faculté, nommé Patin, qui tout de même a feint qu’un de ses malades à qui il fit promettre à l’article de la mort de lui venir dire s’il y avoit un purgatoire, lui étoit apparu un matin, mais sans lui rien dire, car ces gens qui reviennent de l’autre monde ne parlent jamais. (T.)