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à ses médecins. Il y avoit du vin d’Espagne nouveau ; ils lui en laissèrent boire par complaisance ; il en eut une pleurésie qui l’emporta en trois jours.

Desportes, sous le règne de Henri IV, ne laissa pas d’être en estime ; et un jour le Roi lui dit en riant, en présence de madame la princesse de Conti : « M. de Tiron (c’étoit sa principale abbaye), il faut que vous aimiez ma nièce[1], cela vous réchauffera et vous fera faire encore de belles choses, quoique vous ne soyez plus jeune. » La princesse lui répondit assez hardiment : « Je n’en serois pas fâchée ; il en a aimé de meilleure maison que moi. » Elle entendoit la reine Marguerite, que Desportes avoit aimée lorsqu’elle n’étoit encore que reine de Navarre.

Ce fut lui qui fit la fortune du cardinal du Perron, qui étoit sa créature. Quand il le vit cardinal, il fut bien empêché comment lui écrire, car il ne se pouvoit résoudre à traiter de monseigneur un homme qu’il avoit nourri si long-temps. Il trouva un milieu, et lui écrivit domine.

Mais il faut reprendre madame de Simier[2] ; aussi bien nous ne saurions trouver un endroit qui lui soit plus propre que celui-ci.

Elle avoit eu, étant fille de la Reine, une promesse de mariage du jeune Randan (de La Rochefoucauld), et lui, pour s’en dégager, fut contraint de lui donner six mille écus. Après cela, elle s’en alla au Louvre avec une robe de plumes, et dit : « L’oiseau m’est

  1. Le roi appeloit ainsi madame la princesse de Conti, quand il vouloit l’obliger. (T.)
  2. Mademoiselle de Vitry, fille d’honneur de Catherine de Médicis, dont il vient d’être question dans cet article.