Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/223

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Pythagore lui-même, en tant du moins qu’elle remonterait aux Chaldéens. Mes motifs sont les suivants :

L’attribution à Anaxagore de la doctrine sur l’emprunt au soleil de la lumière de la lune est faite par Platon dans le Cratyle en termes qu’il serait bien difficile d’expliquer si le disciple de Socrate avait pu trouver cette doctrine dans le poème de Parménide.

L’accusation de plagiat portée par Démocrite contre Anaxagore et que rapporte Favorinus (Diog. L., IX, 34), est en réalité favorable au Clazoménien, car il eût suffi à Démocrite de montrer la doctrine dans Parménide; au contraire, en déclarant anciennes les opinions d’Ànaxagore sur le soleil et la lune, il se réfère évidemment à des poèmes orphiques, à l’authenticité desquels il croit, alors que ces poèmes pouvaient très bien être postérieurs à Anaxagore. Mais, lui fussent-ils antérieurs, il s’y agissait probablement de tout autre chose; les orphiques, terme sous lequel on peut comprendre au moins une partie des pythagoriens, voulaient assigner dans les astres un séjour aux âmes délivrées de la vie et retrouver dans le soleil et la lune les « îles des Bienheureux » d’Homère; or à des âmes de feu (Hippasos, Parménide) un séjour de feu convient parfaitement ( 1 ).

La théorie d’Anaxagore n’a nullement été un dogme constant de l’école pythagorienne ; si elle fut adoptée par Philolaos et avant ce dernier par Empédocle (sauf pour celui-ci en ce qui concernait la nature de la lune, qu’il considérait non comme une terre, mais comme de l’air condensé jusqu’à être comparable à de la grêle), il nous est dit, en dehors du témoignage relatif à Alcméon, que des pythagoriens récents supposèrent qu’un feu s’allumait et s’éteignait peu à peu et régulièrement à la surface de la lune, de façon à la recouvrir pour la pleine lune, puis à la découvrir tout entière à la conjonction (Aétius, II, 29). Enfin Bérose, qui représente plus tard la tradition chaldéenne, à une époque où elle a déjà subi l’influence hellène, considère encore la lune comme une sphère dont la moitié est enflammée et c’est ainsi qu’il explique les phases (Aétius, II, 25, 29).

Quant à Parménide, divers renseignements doxographiques (12)

(*) Plus tard la thèse change et on en arrive à la pluralité des mondes de Fontenelle. Aétius, II, 13 : « Héraclide (du Pont) et les pythagoriens disent que chacun des astres est un monde comprenant une terre enveloppée d’air dans l'éther infini. Ces dogmes se retrouvent dans les orphiques qui, de chaque astre, font un monde. »