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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.

13. Si la valeur des fragments des anciens physiologues en tant que sources historiques, ne se prête point à une étude d’ensemble, il n’en est pas de même de la seconde classe de renseignements dont nous disposons, et qui d’ailleurs, généralement moins importants au point de vue philosophique, sont au contraire plus précieux pour l’histoire de la science. Les opinions des physiologues sur les questions physiques et naturelles particulières se trouvent, en effet, réunies en abrégé dans divers ouvrages de l’antiquité, écrits, au reste, à différents propos et construits sur des plans différents. Or, si l’on se pose à ce sujet les questions suivantes : À quelles sources ont à leur tour puisé les auteurs de ces écrits, les doxographes grecs, comme on les appelle ? Quels matériaux ont-ils utilisés ? Quels sont les liens qui les rattachent les uns aux autres, et quel degré de confiance peut mériter chacun d’eux ? il est désormais permis de répondre avec une certaine précision.

Jamais les écrits des physiologues n’ont directement servi aux doxographes ; ces derniers se rattachent tous originairement à un grand ouvrage historique composé par Théophraste, et encore cet ouvrage s’est perdu de bonne heure et a été remplacé par des abrégés et des compilations utilisées pour la rédaction de celles que nous possédons aujourd’hui.

C’est à raconter cette histoire, d’après les Prolegomena qu’Hermann Diels a mis en tête de son édition des Doxographi græci (Berlin, Reimer, 1879), que j’ai consacré mon premier chapitre. J’ajoute que, dans mon volume précité sur la Géométrie grecque, j’ai tenté de faire de mon côté, en ce qui concerne la tradition de l’histoire des origines des mathématiques, un travail analogue à celui de Diels pour les origines des sciences physiques. Je ne crois pas sans intérêt de résumer ici brièvement les principales conclusions auxquelles je suis arrivé.

Les histoires de l’arithmétique, de la géométrie et de l’astronomie n’ont été écrites, pour la période hellène, que par Eudème, le condisciple de Théophraste. Ces histoires ont été utilisées, vers la fin de la période alexandrine, par Geminus dans sa Théorie des mathématiques, puis, vers la fin de la période gréco-romaine, par Porphyre et Pappus dans leurs commentaires sur Euclide. C’est de ces ouvrages perdus, et non pas d’Eudème lui-même, que proviennent les citations faites par Proclus au ve siècle dans le Commentaire qu’il écrivit à son tour sur le premier livre d’Euclide