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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.

n’est pas là une nature ; il n’y en a pas du tout ou il y en a pour ces objets, puisque les conditions sont les mêmes. — D’un autre côté, le chaud et le froid, qu’on prend comme principes, devraient avoir une certaine nature, et s’ils en ont une, le reste en a aussi. Cependant, quand il détermine le lourd et le léger suivant les grandeurs, il faut que tout en général ait la même tendance au mouvement, comme s’il n’y avait qu’une seule matière et une nature unique.

72. Mais là-dessus, il semble suivre ceux qui font produire la pensée par le changement, ce qui est une opinion très vieille. Car tous les anciens, poètes et sages, rendent compte de la pensée par la disposition. — Quant aux saveurs, il attribue à chacune une figure qu’il met en rapport avec sa puissance affective ; il aurait dû tenir compte non seulement de cela, mais aussi des organes des sens, en tout cas et puisque ce sont eux qui sont affectés. Car le sphérique ou toute autre figure ne peut avoir toujours la même puissance ; il fallait distinguer, pour le sujet, s’il est constitué de figures semblables ou dissemblables, et comment se produit le changement dans la sensation ; il fallait enfin, là-dessus, expliquer aussi bien tout ce qui concerne le toucher que ce qui regarde le goût. Il y a en effet pour les objets du tact une différence avec les saveurs, qu’il fallait faire ressortir, ou tout au moins il y a là une question omise qui pouvait être traitée.

73. Quant aux couleurs, il en reconnaît quatre simples : d’abord le blanc qui pour lui est le lisse. Car tout ce qui n’a pas des aspérités faisant ombre, et n’est pas d’ailleurs difficile à pénétrer, tout cela est brillant ; il faut au reste que les choses brillantes présentent des pores droits et soient transparentes. Les corps blancs qui sont durs se trouvent composés de pareilles figures, par exemple ce qui garnit intérieurement les coquillages ; de la sorte il n’y a pas d’ombre, les pores sont droits et le corps est bien cassant. Ceux au contraire qui sont friables et s’émiettent facilement sont constitués par des corps arrondis, mais disposés obliquement l’un sur l’autre par couples de deux, en sorte que l’ordonnance soit partout aussi semblable que possible. Dans ces conditions, il y a fragilité, parce que l’union des particules n’a lieu que sur une petite surface ; l’émiettement est facile, parce que la disposition est partout similaire ; il n’y a pas d’ombre, les figures étant lisses et plates. Un corps peut enfin être plus blanc qu’un autre parce que les figures indiquées seront plus exactes, moins mélangées d’autres, et que