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ADIEU.


Oui tous deux ont dit vrai ! le jour devient plus sombre ;
Le silence du soir est proche, je le vois :
De mes pas fatigués je sens peser le nombre,
Et je ne sais quelle ombre,
S’allongeant à mes pieds, grandit derrière moi !

Il le faut : adieu donc, Sylphe à la voix rêveuse ;
Ton servage est fini : va-t-en, mon Ariel,
Libre, que désormais ta forme vaporeuse
Se perde, plus heureuse,
Dans l’écume des mers, ou les brises du ciel.

Je ne me plaindrai point, car tu m’as bien servie :
À toi l’heure qui brille entre ses pâles sœurs ;
À toi chaque minute à la peine ravie,
Et tout ce que ma vie
Entre ses jours amers a compté de douceurs !

Au rayon matinal qui dorait la colline,
Emplissant mon ciel bleu d’harmonieux trésors,
Dès l’aube, tu charmais de ta voix argentine
Mon oreille enfantine,
Inhabile à garder tes fugitifs accords.

Plus tard, c’est encor toi qui des fleurs demi-closes
Me traduisant tout bas le langage embaumé,
Sur ma pâle jeunesse as jeté quelques roses,
Quand leurs feuilles écloses
S’entr’ouvraient sous ton doigt, comme un livre fermé.