Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/477

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avoir subsisté, c’est avoir été quelque chose. Il y a mieux. Si la différence importe, néant ou matière préexistante vont également à ma cause. En effet, soit que Dieu ait créé de rien toutes choses, il pourra encore retirer du néant cette même chair réduite au néant. Soit qu’il les ait formées d’une autre matière, il pourra bien rappeler la chair de l’abîme, quelque abîme qui l’ait engloutie. Qui a fait une chose peut la refaire ; il y a plus de puissance à produire qu’à réparer, à donner l’être qu’à le rendre. Crois donc que le rétablissement de la chair est plus facile que sa création.

XII. Maintenant jette les yeux sur les exemples de la puissance divine. Le jour meurt pour faire place à la nuit, et s’ensevelit partout dans les ténèbres. L’ornement de l’univers se cache sous des voiles funèbres. Tout est décoloré, silencieux, consterné ; partout l’interruption des travaux : la nature a pris le deuil pour pleurer la perle de la lumière. Mais la voilà qui revit pour tout l’univers avec sa magnificence, avec la pompe nuptiale de son soleil, toujours la même, toujours entière, immolant sa mort, c’est-à-dire la nuit, déchirant son linceul, c’est-à-dire ses ténèbres, et se survivant à elle-même, jusqu’à ce que la nuit revive, et avec elle son lugubre appareil. Alors se rallument les rayons des étoiles qu’avaient éteints les clartés du matin. Les planètes, un moment exilées par le jour, sont ramenées en triomphe. La lune répare son disque qu’avait affaibli sa révolution mensuelle. L’hiver, l’été, le printemps et l’automne roulent dans une perpétuelle succession avec leurs influences, leurs habitudes et leurs productions. Sur la terre, mêmes lois que dans le ciel. Les arbres reprennent leur parure, après avoir été dépouillés ; les fleurs reparaissent avec leurs couleurs ; les champs se couvrent une seconde fois de leur verdure ; les semences consumées dans le sein de la terre se relèvent, et ne se relèvent qu’après avoir été consumées. Sagesse admirable ! Elle nous prive de nos biens pour nous les conserver ; elle les