Page:Thoinan - Les Relieurs français, 1893.djvu/144

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couramment, on y regardait à deux fois avant de l’employer aux reliures. Auguste de Thou, qui cependant n’économisait guère pour sa bibliothèque et possédait beaucoup de volumes habillés en maroquin, en faisait aussi couvrir en vélin blanc et même en basane verte de médiocre qualité.


La dorure sur tranches paraît dater du règne de Louis XII ; on chercha même, dès le début du procédé, à en augmenter encore l’effet par des ornements ciselés au moyen de fers qui, frappés au marteau sur les tranches, s’y imprimaient en creux. C’étaient des guillochis, des arabesques, des emblèmes, et le plus souvent des lettres initiales. Rehaussée quelquefois par des tons de couleurs variées, cette ornementation pouvait plaire à l’état de neuf ; mais, avec le temps, la poussière incrustée dans les creux produisait un aspect terne et peu agréable. Le système avait encore pour inconvénient d’obliger à prendre quelque précaution pour tourner les feuillets, qui, pris ensemble par les incisions pratiquées, ne se détachaient pas facilement les uns des autres[1]. On fera plus tard de nouveaux frais pour l’embellissement des tranches par la ciselure, et cette opération s’appellera : antiquer les tranches.

Le parchemin[2] se gondolant facilement sous l’influence de la température, il était indispensable, pour tenir les livres bien fermés, de les attacher, et on le faisait au moyen âge par de simples lanières ou des rubans pour les volumes ordinaires, et par des fermoirs d’argent ou d’or plus ou moins ouvragés pour les livres riches. Cette habitude se conserva assez longtemps même pour les volumes imprimés sur papier ; mais les fermoirs

  1. Nous possédons un petit volume à la marque de François II, portant un F ciselé sur les tranches et dont l’état fatigué indique un usage très fréquent ; on risque encore, néanmoins, de déchirer les feuillets en les tournant, si on ne le fait pas avec soin.
  2. Nous avons dit, p. 9, que la reliure des livres en parchemin était un travail spécial, que les artisans qui la pratiquaient étaient appelés relieurs de livres enparchemin, et que beaucoup d’enlumineurs, même dans le xvie siècle, reliaient eux-mêmes ou faisaient relier chez eux les manuscrits qu’ils avaient décorés.