Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/297

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

part un prisonnier ; d’autres couraient s’acheter des provisions et ranger leurs sacs dans les wagons ; d’autres enfin s’empressaient autour d’une dame qu’accompagnait l’officier du convoi ; et nul ne mettait d’empressement à répondre aux questions de Nekhludov.

Celui-ci aperçut l’officier quand le second coup de cloche était déjà sonné. Il essuyait, de sa main courte, sa moustache, et, les épaules soulevées, morigénait un sergent-major.

— Que désirez-vous ? demanda-t-il à Nekhludov.

— Il y a une femme qui accouche dans un des wagons, et j’ai pensé que…

— Eh bien ! qu’elle accouche ! On verra après, fit l’officier en montant dans son wagon, avec un balancement décidé de ses bras courts.

Au même instant, passa le conducteur, son sifflet à la main. Le dernier coup de cloche puis le sifflet se firent entendre. Des cris et des lamentations s’élevèrent parmi les gens qui se tenaient sur le quai, et dans les wagons des femmes. Nekhludov, ayant près de lui Tarass, vit défiler devant lui, l’un après l’autre, les wagons aux fenêtres grillées, où il apercevait les crânes rasés des hommes. Puis apparut le premier wagon des femmes, aux fenêtres duquel on voyait des têtes en fichus ; puis le deuxième, d’où partaient les gémissements de la femme en cou-