Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol37.djvu/468

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concerne un prisonnier politique qui fait partie du même convoi.

— Ah ! ah ! fit le général, avec un hochement de tête significatif.

— Il est très malade, mourant même. On va sans doute le laisser ici, à l’hôpital. Alors une des condamnées politiques voudrait demeurer auprès de lui.

— Elle n’est pas sa parente ?

— Non. Mais elle serait prête à l’épouser, si cela lui permettait de rester auprès de lui.

Le général, sans mot dire, et sans cesser de fumer, fixa ses yeux brillants sur Nekhludov, avec le désir évident de troubler son interlocuteur par son regard.

Quand Nekhludov eut terminé, il prit un livre sur la table, mouilla ses doigts pour le feuilleter plus rapidement, puis, ayant trouvé l’article concernant le mariage, il le lut.

— À quoi est-elle condamnée ? demanda-t-il en relevant les yeux.

— Elle ? Aux travaux forcés.

— Dans ce cas, la situation des condamnés ne serait nullement modifiée du fait du mariage.

— Mais…

— Permettez ! Si elle épousait un homme libre, elle devrait quand même subir sa peine. La question est de savoir qui est condamné à la peine la plus forte, elle ou lui ?