Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol1.djvu/84

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museau sur mes genoux et resta tranquille.

Près des racines nues du chêne sous lequel j’étais assis, sur la terre grise, sèche, parmi les feuilles mortes, les glands, les petits morceaux desséchés et couverts de lichens, les petites herbes fines, vertes, qui rarement se dressaient au milieu de tout cela, circulaient une multitude de fourmis les unes derrière les autres, chargées ou sans fardeau. Elles se hâtaient, en suivant de petits sentiers tracés par elles ; je pris de petites branches et leur barrai la route. Il fallait voir comment les unes, méprisant le danger, passaient dessous ou grimpaient par-dessus, tandis que d’autres, celles qui portaient les fardeaux, étaient perdues et ne savaient que faire ; tantôt elles s’arrêtaient, cherchaient une issue pour fuir, ou, par la petite branche sèche, grimpaient jusqu’à ma main, et me semblait-il, avaient l’intention de se glisser sous la manche de mon veston. Je fus détourné de ces observations intéressantes par un papillon à petites ailes jaunes, qui voletait gracieusement devant moi. Dès que je l’eus remarqué, il s’envola à deux pas de moi, tournoya autour d’une fleur de trèfle sauvage, blanche, presque fanée et s’y posa. Je ne sais si c’est le soleil qui le chauffait ou s’il pompait le suc de cette herbe, mais on voyait qu’il s’y trouvait très bien. De temps en temps, il agitait ses petites ailes, se serrait contre la fleur et enfin il resta tout à fait immobile. J’ap-