Page:Tolstoï - Œuvres complètes vol27.djvu/15

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soir même, chez Fedor Vassilievitch. Mais il n’était pas sans doute dans la destinée de Piotr Ivanovitch de jouer aux cartes ce soir-là. Prascovie Fédorovna, une femme petite et grosse, qui, malgré tous ses efforts, allait en s’élargissant depuis les épaules jusqu’à sa base, toute vêtue de noir, la tête couverte d’une dentelle, les sourcils étrangement relevés, comme ceux de la dame qui se tenait debout en face du cercueil, sortit de ses appartements avec d’autres dames et, les ayant accompagnées dans la chambre mortuaire, elle dit : « L’office des morts va commencer ; entrez ».

Schwartz salua d’un air vague et s’arrêta, ne paraissant ni accepter ni refuser cette invitation. Prascovie Fédorovna, ayant reconnu Piotr Ivanovitch, soupira, s’approcha tout près de lui, et lui dit en lui prenant la main : « Je sais que vous étiez un sincère ami d’Ivan Ilitch… » Elle le regarda, attendant de lui quelque chose qui confirmât ses paroles. Piotr Ivanovitch savait, comme il avait su tout à l’heure qu’il fallait se signer, qu’il devait maintenant serrer la main et dire : « Croyez que… » C’est ce qu’il fit, et il sentit que le résultat désiré était obtenu : il était ému, et elle était émue.

— Voulez-vous venir avant que cela ne commence ? dit la veuve. J’ai à vous parler. Donnez-moi votre bras.

Piotr Ivanovitch lui offrit son bras et ils se diri-