Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/321

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saurais même pas où tu as couché ; je vais tâcher de me rappeler. »

Pétritzky retourna derrière la cloison et se recoucha.

« C’est ainsi que j’étais couché, et lui se tenait là, oui, oui, oui, m’y voilà. »

Et il tira une lettre de dessous son matelas.

Wronsky prit la lettre qu’accompagnait un billet de son frère ; c’était bien ce qu’il supposait : sa mère lui reprochait de n’être pas venu la voir, et son frère lui disait qu’il avait à lui parler.

« En quoi cela les regarde-t-il ? » murmura-t-il, pressentant de quoi il s’agissait, et il chiffonna les deux papiers, qu’il introduisit entre les boutons de sa redingote, avec l’intention de les relire en route plus attentivement.

Au moment de quitter l’izba, il rencontra deux officiers dont l’un appartenait à son régiment. L’habitation de Wronsky servait volontiers de lieu de réunion.

« Où vas-tu ?

— À Péterhof pour affaire.

— Le cheval est-il arrivé ?

— Oui, mais je ne l’ai pas encore vu.

— On dit que Gladiator, de Mahotine, boite.

— Des bêtises ! Mais comment ferez-vous pour courir avec une boue pareille ? »

« Voilà mes sauveurs ! » cria Pétritzky en voyant entrer les nouveaux venus. Son ordonnance, debout devant lui, tenait sur un plateau de l’eau-