Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/108

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à son muride Asaldar, et celui-ci la frappa par derrière et la tua.

— Pourquoi la fit-il tuer ? demanda Loris Melikoff.

— Mais comment pouvait-il en être autrement ? Une fois qu’on a fait avancer les jambes de devant, il faut faire avancer les jambes de derrière. Il fallait exterminer toute la famille. Ainsi firent-ils. Schamyl tua le cadet en le jetant du haut d’un précipice.

Toute l’Abazie se soumit à Gamzat, mais moi et mon frère nous ne voulûmes pas nous soumettre. Nous devions venger par le sang le sang des Khans. Nous feignîmes de nous soumettre mais nous n’avions qu’une seule pensée : nous venger de lui. Nous avons alors demandé conseil au grand-père et avons résolu d’attendre sa sortie du palais et de le tuer dans un guet-apens. Quelqu’un ayant surpris notre projet alla tout raconter à Gamzat. Il fit appeler chez lui notre grand-père et dit : « Prends garde ; s’il est vrai que tes petits-fils projettent quelque chose de mauvais contre moi, tu seras pendu avec eux à la même potence. J’accomplis l’œuvre de Dieu, et nul ne peut m’en empêcher. Va, et souviens-toi de mes paroles. »

Le grand-père s’en vint nous raconter tout. Alors nous décidâmes de ne pas attendre et de faire notre besogne le premier jour de fête, dans la mosquée. Les camarades ayant refusé, nous restâmes seuls, moi et mon frère.

Chacun de nous prit deux pistolets ; et, en-