Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/183

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là une magnifique tente de drap, et sa femme, Marie Vassilievna, souvent venait au camp et y couchait. Les relations de Marie Vassilievna avec Bariatinski n’étaient un secret pour personne, c’est pourquoi les officiers qui n’étaient pas de l’entourage immédiat et les soldats, entre eux, l’injuriaient grossièrement parce que, à cause de sa présence dans le camp, on les envoyait, la nuit, au guet. Ordinairement les montagnards avançaient des canons et lançaient des obus dans le camp ; dans la plupart des cas ces obus n’atteignaient pas leur but, aussi, en temps ordinaire, ne prenait-on aucune mesure contre ces attaques. Mais pour que les montagnards ne pussent tirer et effrayer ainsi Marie Vassilievna, on envoyait le guet. Et aller chaque nuit au guet pour que Madame ne soit pas effrayée, c’était offensant et révoltant, et les soldats et les officiers qui n’étaient pas reçus dans la haute société, injuriaient sans se gêner Marie Vassilievna.

Boutler, pour voir des camarades du corps des pages ainsi que d’anciens camarades de régiment qui servaient dans le régiment de Kourinsk et les aides de camp qu’il connaissait, de la forteresse se rendit un jour au camp. Tout de suite il se sentit très gai. Il s’installa dans la tente de Poltoradski, et retrouva beaucoup de connaissances qui l’accueillirent avec joie. Il alla voir aussi Vorontzoff qu’il connaissait un peu, parce que, à un moment donné, tous deux avaient servi dans le même régiment. Vorontzoff reçut Boutler