Page:Tolstoï - Hadji Mourad et autres contes.djvu/347

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

compte, mais, inconsciemment, il s’y intéressait. En lisant tout ce qui lui tombait sous la main, il attendait la réponse à cette question. Mais les livres qu’il lisait ne la lui donnaient pas.

IV

À Moscou, sa sérénité avait été bien vite troublée. Cette question : pourquoi la vie des hommes est-elle arrangée de telle façon que les uns dépensent trois roubles pour des parfums, et d’autres restent des journées entières sans manger, tandis que les cloches sonnent dans les églises et que brille l’or des icônes et des chasubles ? lui venait en tête de plus en plus souvent.

Toute la vie qui l’entourait se présentait à lui comme une vaste énigme compliquée, dont la divination était devenue pour lui le problème qui le troublait sans cesse.

Son père, sa mère (qu’il aimait plus que tout), sa fiancée Agrafena, son mariage, là-bas, à la campagne, tout cela le préoccupait, mais ce n’était qu’une goutte dans la mer en comparaison de l’intérêt qu’il apportait à résoudre l’énigme de la vie.

Sa vie extérieure allait comme va la vie de tous ceux qui travaillent chez des étrangers. Il logeait avec des pays. À huit heures du matin, il venait au bureau, prenait les comptes, les inscrivait dans le livre et inscrivait également