Page:Tolstoï - Ma religion.djvu/228

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nisait sa vie d’une façon absolument contraire à la doctrine de Jésus, et l’Église imaginait des compromis dans le but de démontrer que les hommes, tout en vivant contrairement à la loi de Jésus, vivent d’accord avec cette loi. Il en résulta finalement que le monde se mit à vivre d’une existence pire que l’existence des païens et que l’Église, non seulement justifia cette vie, mais prouva que c’est précisément en cela que consiste la doctrine de Jésus.

Mais vint un temps où la lumière de la vraie doctrine de Jésus qui se trouvait dans les Évangiles se fit jour malgré l’Église qui, se sentant coupable, tâchait de l’étouffer (par exemple en prohibant la traduction de la Bible) ; vint un temps où cette lumière pénétra jusqu’au peuple par l’intermédiaire des sectaires, même des libres-penseurs mondains, et la fausseté de la doctrine de l’Église fut mise au grand jour devant les hommes qui commencèrent à changer leur ancienne existence justifiée par l’Église.

Ainsi les hommes eux-mêmes, indépendamment de l’Église, abolirent l’esclavage justifié par l’Église, abolirent le pouvoir des empereurs et des papes sanctifié par l’Église, et ont procédé maintenant à l’abolition de la propriété et de l’État. Et l’Église n’a rien défendu de tout cela, et ne peut rien défendre maintenant, parce que l’abolition de ces iniquités est en conformité avec cette même doctrine chrétienne que prêche et qu’a prêchée l’Église après l’avoir faussée.

Ainsi, la doctrine de la vie des hommes s’est émancipée de l’Église et a pris de l’autorité indépendamment d’elle.

L’Église ne garda que ses explications, mais ses expli-