Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/135

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sirop de gomme qui n’a rien avancé. » Survient madame Töpffer, qui dit son idée. « Eh bien, chère madame, faites-moi cette consolation de voir notre petite en passant ! Vous lui ferez du bien en attendant le médecin que je vas quérir. » C’est le cas ou jamais d’être médecin malgré soi ; en sorte que nous promettons tout ce qu’elle veut à cette brave femme, qui repart émue comme elle est mais soulagée pourtant.

Au bout de deux grandes heures, nous atteignons le sommet du col. De cet endroit, l’on aperçoit, tout au fond d’une étroite et nue vallée, quelques grises toitures éparses sur un bout de pâturage : c’est Trient ! Aussitôt l’avant-garde d’y courir pour commander le déjeuner et en hâter les apprêts. Honneur sans doute à l’avant-garde !… mais il n’en est pas moins vrai que dès ici commencent, pour le traînard affamé, les doux moments, les croissantes joies. Sans hâter le pas, bien mieux ! tout en s’accordant désormais de petites haltes inestimables, il voit au-dessous de lui les messagers de la faim descendre à grands sauts, arriver au bas, enjamber les clôtures, couper par les prairies, et franchir un seuil… il voit une riche fumée s’élever en tournoyant dans les airs, et, rempli d’aise à ce ravissant signal, il se lève, ingambe et léger, pour ne plus se rasseoir qu’autour d’une table qui se trouve servie quand il arrive. Celui qui écrit ces lignes