Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/158

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bien portants, sont d’ailleurs tout autrement agréables à voir que ceux de Lavey. Depuis la retraite de M. Gonthard, on a agrandi les bâtiments, embelli les abords, creusé un lac et posé des balançoires, mais on n’a remplacé par rien d’équivalent l’originale et comique royauté de M. Gonthard lui-même, cette quotidienne gaieté qu’entretenaient également et ses colères, et ses caprices, et ses artistiques fantaisies, et ses propos pâteux comme son organe, fins comme son regard, de côté comme toute sa personne. Aujourd’hui l’on n’y a plus affaire qu’avec les valets gagés d’une administration gagée, qu’avec les subalternes indifférents d’une royauté invisible. Du reste, même fraîcheur quelquefois trop crue, mêmes pentes pour sortir de cet entonnoir, même nature aussi, ici agreste, là sauvage, plus haut sublime, partout admirable. Et nous serions ingrats si nous n’ajoutions pas que, personnellement, nous y sommes traités comme du temps de M. Gonthard, c’est-à-dire, pour peu d’argent, tout à fait bien.

Vers le milieu du jour, M. G… nous fait ses adieux, et nous partons tout à l’heure avec M. le professeur D…, qui s’est décidé à nous accompagner jusqu’à Nant-Bourant. M. Töpffer pourvoit ici la caravane d’un mulet de secours et d’un guide surnuméraire. Ce guide surnuméraire se trouve être une sorte de radoteur grisâtre, usé comme un vieux chapeau, fêlé comme un timbre fendu, et qui va au doigt comme une pendule