Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/194

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mais, eux, timides, et ne souffrant que l’approche de leurs pâtres, ils bondissent et fuient.

Au bas du couloir, et après avoir traversé la rivière sur un pont de bois, nous nous trouvons mêlés aux vaches qui regagnent les chalets. Tandis que les plus jeunes d’entre elles s’arrêtent à chaque instant pour folâtrer, les vieilles s’attardent, quelques-unes boitent ; toutes, tour à tour, suspendent leur marche pour nous considérer curieusement, et le manant qui les accompagne nous assure qu’il en a dix-neuf, vingt et quinze sous sa garde. Est-ce ce manant, sont-ce ces vaches, qui nous font trouver si agréable ce bout de chemin ? Toujours est-il que c’est ici un de ces quarts d’heure dont, on ne sait pourquoi, le charme se grave dans le souvenir pour y survivre à celui de bien des plaisirs dont il serait plus facile de se rendre compte. Mais c’est l’heure du soir, le ciel est pur, et nous touchons au gîte.

Un grand gendarme est sur le seuil ; gendarme valaisan, c’est-à-dire bon homme, hospitalier, et qui se fait d’emblée notre ami dévoué. « Belle jeunesse, dit-il, et puis propre ! Entrez, messieurs, mesdames, et faites-vous servir. » Nous entrons. Bétique, où êtes-vous ? Âge d’or, vous voilà ! Rien qu’une bonne vieille, un grand âtre, des marmites et une échelle. Par cette échelle, on nous fait monter jusque dans un fenil qui mène à une chambrette sans espace, sans chaises et sans ressources.

Mais que ne peuvent la nécessité, l’industrie, du pain, du vin et une