Page:Topffer - Nouveaux voyages en zigzag Grande Chartreuse, 1854.djvu/218

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que votre crânerie, sans autre morale que celle de vous donner à celui qui vous aura plu, mais contentez-vous de ces avantages, et que votre plume n’attaque pas en public ce que votre cœur lui-même, moins perverti que votre esprit, ne peut s’empêcher d’absoudre, d’aimer, de révérer en secret !

Le jeune officier, brillant de bonheur, de santé et d’appétit, se met à table, où il prodigue à sa mère des soins respectueux, à ses jeunes sœurs des attentions à la fois familières et courtoises. Mais l’une d’elles, de plus en plus pâlissante, après s’être contrainte de parler, de sourire, pour dérober aux regards le malaise qu’elle éprouve, est déjà près de défaillir… ; à la fin sa tête s’incline, ses beaux yeux se ferment, et elle demeure froide et immobile. Aidées de madame T… ses deux compagnes l’emportent dans une chambre voisine, où bientôt elle a repris ses sens ; et c’est ainsi que nous nous trouvons pour quelques instants associés à l’émotion, au trouble, puis à l’expansive joie de ces personnes, dont la vue déjà avait provoqué notre considération et notre sympathie. Après quelques causeries, on se sépare amicalement, et chacun gagne sa cellule.