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NEUVIÈME JOURNÉE.


Au couvent, sortir du lit n’est pas récréatif. Murailles, planchers, tables, ustensiles, tout est froid comme une roche à l’ombre. De plus, au lieu des sérénités radieuses d’hier, la pluie fouette les vitres des croisées, et le vent balaie le col. Quel dommage ! Mais il ne sert de rien de s’apitoyer. Le plus pressé c’est de déjeuner bien vite, car deux, trois, quatre caravanes attendent que nous ayons libéré la table pour pouvoir déjeuner à leur tour.

Vers neuf heures, le temps s’éclaircit. Nous en profitons pour prendre congé des Pères et pour nous mettre en route. Mais une fois engagés dans cette antique chaussée qui serpente dans la gorge supérieure du mont Saint-Bernard, la pluie recommence de plus belle, et, au lieu des diaphanes clartés de tout à l’heure, ce ne sont autour de nous que grises nuées ou tristes noirceurs. Cependant, derrière nous, un bruit de pas se fait entendre. C’est un vieux de roche, trapu, cambré, veste et culotte de futaine, l’œil franc, la figure ouverte, et qui, marchant à la bonne, fait retentir sous ses souliers ferrés les dalles de la chaussée. Désireux que