Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Je me levai, je me rassis, je me levai encore, les yeux toujours fixés sur la cloche, que je tremblais de voir s’ébranler de nouveau. J’écoutais attentivement, dans l’espérance que je l’entendrais s’éloigner ; mais un autre bruit frappa mon oreille, c’était celui des pas de mon oncle Tom qui bougeait dans ma chambre. Alors, la crainte plus grande encore d’être surpris par lui en présence de la jeune fille me troublant tout à fait, j’aimai mieux aller à la rencontre du danger que de l’attendre. Je retournai tout doucement en arrière pour paraître venir de la bibliothèque, puis je toussai, et, d’un pas affermi par la peur, je vins et j’ouvris… Sa gracieuse figure se dessinait en silhouette sur le demi-jour de l’escalier. — Monsieur Tom est-il chez lui ? dit-elle.




Ce furent les premières paroles que j’entendis sortir des lèvres de la belle juive. Elles résonnent encore à mon oreille, tant eut de charme pour moi le son de cette voix. Pour le moment, quoique la question ne fût pas compliquée, je n’y répondis rien, moins par adresse pourtant que par trouble, et je me mis gauchement à la précéder vers la bibliothèque, où elle me suivit.

J’allai sans me retourner jusqu’à la table de mon oncle. J’aurais désiré que cette table fût bien loin, tant je redoutais le moment de rencontrer son regard. À la fin je la vis ; elle me reconnut et rougit.

Où était ma harangue ? À mille lieues. Je gardai le silence, plus rouge qu’elle, jusqu’à ce que, la situation n’étant plus tenable, voici comment je débutai :

— Mademoiselle… et j’en restai là.

— Monsieur Tom… reprit-elle. Puis, surmontant son