Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/288

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que vous aviez chargé de vos démarches ; c’est lui aussi qui, tout à l’heure, alarmé des conséquences que pourraient avoir les bruits que vous venez de démentir, et sachant qu’ils étaient parvenus à ma connaissance en même temps que ce manteau accusateur, est venu se faire auprès de moi votre défenseur. Il avait vos aveux, il implorait mon indulgence, il me priait d’étouffer un scandale qui pouvait vous nuire, il me suppliait d’employer mon influence à vous détourner d’une honteuse liaison… Maintenant, mettez-vous à ma place ; jugez vous-même combien la vérité est difficile à atteindre, même pour celui qui la cherche avec le plus de désir, et ne vous offensez plus de ce que vous ne rencontrez pas, dès l’abord, cette réparation pleine et facile que votre innocence peut vous faire envisager comme un droit évident et sacré.

En proie à mille sentiments contraires et impétueux ; indigné contre mon parrain, dont l’âme trop peu élevée avait interprété mes paroles honnêtes comme les feintes honteuses du libertinage ; possédé d’estime et de respect pour l’homme qui me parlait, et pressé de répondre à tout à la fois, je restai quelques instants en silence, dominé par une agitation qui peu à peu se calmait, à mesure que j’écartais de ma pensée toutes les réponses qui n’auraient pas paru péremptoires, ni satisfait aux exigences de ma fierté et de mon innocence, toutes deux outragées. À la fin, trouvant un langage : — Monsieur, lui dis-je avec autant de calme que pouvaient m’en laisser les émotions que je comprimais, vous ne m’offensez point. Quand un parent me flétrit à plaisir, pourquoi attendrais-je de vous une opinion honorable qu’il n’a pas lui-même ? Mais j’ai de quoi détruire vos soupçons et rassurer vos scrupules… oui,