Page:Tourgueniev - Pères et fils.djvu/312

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Il avait envoyé chercher un médecin à la ville, dès le matin ; il jugea convenable d’en prévenir son fils, afin que celui-ci ne lui en fît point de reproche en présence de son confrère.

Bazarof se tourna tout à coup sur le divan où il était couché, regarda fixement son père et lui demanda à boire.

Vassili Ivanovitch lui donna de l’eau, et profita de ce moment pour poser la main sur son front : il était brûlant.

— L’ancien, dit Bazarof lentement et d’une voix rauque ; cela prend une méchante tournure. J’ai gagné une infection, et tu me mettras en terre dans quelques jours.

Vassili Ivanovitch chancela comme s’il eût reçu un coup violent dans les jambes.

— Eugène, balbutia-t-il, que dis-tu là ! c’est un simple refroidissement.

— Allons donc ! reprit Bazarof. Il n’est pas permis à un médecin de dire de pareilles choses. J’ai tous les symptômes d’une infection ; tu le sais bien.

— Les symptômes… d’une infection ?… Oh ! non… Eugène !

— Qu’est-ce donc que cela ? dit Bazarof, et, retroussant la manche de sa chemise, il montra à son père les taches rougeâtres d’un mauvais augure qui couvraient sa peau.

Vassili Ivanovitch pâlit d’effroi.

— Admettons… quand même… cela serait… quel-