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Page:Tremblay - Arômes du terroir, 1918.djvu/53

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LA MOISSON DES GUÉRETS

Il n’a pas écouté les bruits ferroviaires,
Qui transpercent les monts et sautent les rivières,
Unissent les confins des vastes continents,
Et, portant le fracas de leurs locomotives
De la ville de proie aux campagnes actives,
Arrachent au labour les vœux incontinents
— Car c’est là le malheur des vanités aveugles,
Qui fuient vers la Cité quand la ferraille meugle
Sur les lisses d’acier et les cantilivers :
Elles cherchent la joie et les amours faciles
Dans les salons troublés des riches domiciles,
Dont les murs bornent l’univers.

Il ignore le temple où les femmes parées
Étalent un orgueil d’idoles adorées,
Et montrent leurs doigts blancs, fléchis par le fardeau
Lourd des gemmes sertis en bagues de platine,
En faisant remuer leurs lèvres par routine,
Pour tromper saintement l’œil terne du bedeau ;
Mais le village prie en son humble chapelle,
Et songe au Paradis, que sa croyance appelle
Et demande à genoux devant l’Enfant-Jésus,
Car les cœurs sont naïfs, et sincères les âmes,
Tant l’effroi du péché que punissent les flammes
Laisse les vains désirs confus.