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PIERRE QUI ROULE

mettre à feu et à sang qu’ils n’auraient pas élevé la voix de crainte de passer pour des révolutionnaires ; mais, si l’un des nôtres se fût avisé de conseiller d’opposer la force à la violence brutale des véritables ennemis du catholicisme, nos ultra-cléricaux, seuls dépositaires des saines traditions, se seraient empressés d’excommunier cet audacieux, comme imbu d’erreurs modernes et de principes subversifs.

« Cependant, ce qui se passait sous leurs yeux, dans cette glorieuse colonie anglaise où le catholicisme leur paraissait si puissamment protégé sous l’aile de l’orangisme monarchique, était non seulement beaucoup plus criant que tous les excès de zèle des anti-cléricaux de la France républicaine, mais on y mettait beaucoup plus de cynisme chez nous, où l’impunité des malfaiteurs établissait hors de doute la complicité des pouvoirs établis. Voici le résumé des principaux témoignages entendus à l’enquête relative à l’affaire d’Oka :

« Le révérend Jean F. Lacan dit :

« Depuis près de quatre ans, j’étais chargé de l’administration de la propriété du séminaire et de l’église incendiée à Oka le 15 juin dernier (1877).

« Dans l’après-midi du 14, un cultivateur nommé Lamarque est venu me dire qu’environ vingt-cinq ou trente Indiens étaient passés près de chez lui. Quelques-uns étaient armés et se dirigeaient vers Oka. Le même soir, il circula une rumeur disant que les Indiens incendieraient le village pendant la nuit. Les Indiens avaient déjà dit qu’ils y mettraient le feu. Je télégraphiai immédiatement au colonel Amyot qui me répondit que ses hommes étaient partis et qu’ils ne pouvaient venir.

« Vers quatre heures du matin, j’entendis un coup de canon. J’ouvris la fenêtre et, je vis plusieurs Indiens armés de fusils, se dirigeant vers l’Est. J’allai