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ACI — ACI


On le fait venir du Grec ἀϰίς, pointe, parce que les acides piquent la langue. Les acides ont les parties longues, flexibles, pénétrantes, & atténuantes qui ont des pointes aiguës & perçantes. Il y a des acides naturels, & des acides artificiels. Les acides naturels sont ceux qui ont l’acidité de leur propre nature, comme le jus de citron, &c. Les acides artificiels sont ceux qui le sont par le moyen du feu dans les opérations de Chimie. Ainsi les esprits acides, ou liqueurs infernales, comme les Chimistes les appellent, à cause de la force qu’elles ont de détruire ou de dissoudre les corps ; ces liqueurs, dis-je, ne sont autre chose qu’un sel acide dissous, & mis dans un violent mouvement par le moyen du feu. Harr.

Le vitriol est le plus grand des acides, ensuite le sel marin, & puis le salpêtre, le soufre, le vinaigre, & enfin l’alun. Cet acide diffère de ce qu’on appelle au propre aigre ; parce que l’aigre ne se dit proprement que de la saveur ; au lieu que l’acide des Philosophes se dit de tout ce qui est corrosif, & qui pénètre, dissout, ou corrompt la substance des choses. Il est composé de petites parties aiguës qui s’insinuent dans les pores des corps qu’elles rencontrent, & en font la désunion, & la séparation. Les liqueurs acides rougissent la teinture du tournesol. Pour connoître si une liqueur contient quelqu’acide, il ne faut qu’en verser un peu sur du syrop de violettes étendu sur du papier, ou sur une dissolution de fleurs de bluet ; car alors le bleu se changera tout d’un coup en rouge, ou en couleur de pourpre ; & s’il se change en verd, c’est un signe que la liqueur abonde en sels urinaux, ou lixiviaux. Harris. Voyez l’effet des acides, pour le changement des couleurs & des saveurs, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences, écrits par Mr Dodard, ou dans le Traité de Mr Boyle, de la nature des couleurs.

Les acides tempèrent l’ardeur des fièvres, à cause qu’en épaississant la masse du sang, ils en rallentissent les mouvemens impétueux. Les acides versés sur les matières huileuses y causent des changemens qui varient, suivant la nature différente des acides & des matières grasses qu’on veut mêler. La plupart des acides coagulent, & figent le lait. Le mélange d’esprit de nitre & d’esprit de vin, donne une effervescence considérable, accompagnée d’une grande chaleur & d’une raréfaction très-sensible. L’esprit de nitre bien déflegmé & versé sur l’huile de gayac, ou sur celles de gérofle & d’ambre, enflamme tout aussi-tôt ces matières huileuses.

Acide, Terme de Médecine, est un suc séparé par le pancréas. Succus acidus. L’usage du pancréas est de séparer & de filtrer, par le moyen des glandes dont il est composé, un suc acide, qui est porté ensuite par son canal dans le duodénum, où ce suc sert de dissolvant, conjointement avec la bile, pour y donner au chyle sa dernière perfection. On l’appelle aussi Suc Pancréatique. Voyez ci-après ALKALI.

☞ Ce mot est pris du Latin acidus, qui signifie la même chose que aigre, quoiqu’il y ait cette différence, que aigre n’est que pour la saveur, au lieu qu’une chose est quelquefois appellée acide, quoiqu’elle n’ait aucune saveur manifeste, & seulement parce qu’elle fait les autres effets qui se rencontrent dans celles qui sont aigres au goût, comme de pénétrer, de dissoudre, de rougir le tournesol. On se sert du mot acide dans les sciences, plûtôt que du mot aigre, peut-être parce qu’aigre a des significations figurées, qui le rendent équivoque : car on le prend quelquefois pour ce qu’il y a de piquant dans l’esprit, dans l’humeur, dans les paroles. Perrault.

ACIDITÉ. s. f. Qualité aigre & piquante qu’on trouve dans tous les acides. Sentiment d’aigreur qu’excitent les acides en piquant la langue. Acor. Un peu de vitriol laisse dans l’eau une acidité agréable. Le vinaigre & le verjus ont des acidités différentes. L’acidité des câpres réveille l’appétit. On corrige l’acidité des limons par le sucre. Les alimens, qui par leur acidité, produisent une fermentation, causent la fièvre.

ACIDULÆ, s. f. & plur. Terme de Médecine. On appelle ainsi des eaux minérales, qui ne sont point chaudes. Harris, On les appelle ainsi, dit Hofman, parce que leurs eaux sont un peu acides ; le même Auteur les appelle aussi fontaines vineuses. Fontes vinosi.

ACIDULER, v. act. Terme de Médecine. Ce mot n’est guère en usage : il signifie, mettre des sucs acides dans quelque chose. Jus acidum infundere, succo acido perfundere.


Acidulé, ée, part. Il est plus en usage que son verbe. On dit, il faut donner à ce malade des bouillons médiocrement acidulés ; c’est-à-dire, dans lesquels on aura mis un peu de verjus, ou un peu de jus de citron, Acido succo perfusus, tinctus, mistus.

ACIER, s. m. Fer rafiné, purifié par l’art, & conduit à une plus parfaite mixtion, par la coction du feu, & par l’attraction d’une humidité convenable qui engraisse sa sécheresse naturelle, & le rend plus blanc & plus solide, avec un grain plus petit & plus fin. Acies, Chalybs. C’est celui de tous les métaux qui est susceptible d’une plus grande dureté, quand il est bien préparé. On le fait en le tenant dans un grand feu parmi des cornes de bœuf, & des charbons de saule, ou de hêtre, & en le plongeant dans des eaux ou décoctions astringentes & fort froides, après l’avoir coupé en plusieurs parties, & fait fondre plusieurs fois. On fait l’acier de deux façons, par la fonte, ou par la cémentation. Voyez ces mots. M. Felibien en compte de cinq forces. Il y a un acier naturel, & qui en a toutes les qualités en sortant de la mine. On peut voir dans le Mercure de Septembre 1736, la description d’une mine d’acier trouvée près de Strasbourg en Alsace.

Le petit Acier commun, qu’on appelle Soret, Clamecy, ou Limosin, est le moindre de tous, & le moins cher. On le vend par carreaux, ou billes. Le meilleur est celui qui est sans pailles, ni surchauffures, & qui paroit net, & d’un grain blanc & délié, quand on le casse. Mais s’il est plein de veines noires, ou de pailles, que l’on apperçoit aisément en le rompant ; ou s’il est surchauffé, c’est-à-dire, s’il a eu trop chaud, en sorte qu’il paroisse comme grillé & en petits grumeaux, il ne vaut rien.

L’Acier de Piémont est aussi en carreaux, plus gros que le clamecy. Pour le bien choisir, il faut prendre garde si les carreaux sont nets, sans pailles & sans surchauffures. S’il a des taches jaunâtres, c’est une marque qu’il est difficile à souder & à allier avec le fer. Il vient de Piémont deux sortes d'acier. L’un artificiel, & l’autre naturel. L’artificiel est le moins bon. Pourvu cependant qu’il soit bien trempé & affiné deux fois, il sert à acérer des marteaux, & autres outils propres à un travail de force & de violence.

L’acier qui vient d’Allemagne, est en petites bandes. On l’emploie à faire des épées, des ressorts, &c.

L’Acier de Carme, ou à la Rose, vient aussi d’Allemagne & de Hongrie. Il est bon à faire des ciseaux, des rasoirs, des instrumens de Chirurgie, &c. Ces deux sortes d’Acier d’Allemagne sont les meilleures dont on se serve en France.

L’Acier de grain, ou l’Acier de Motte, ou de Mondragon, est apporté d’Espagne par grosses masses. Quand il est bien choisi & bien affiné, il est propre à acérer des outils qui doivent être durs, & avec lesquels on travaille à des ouvrages pénibles, comme à couper le marbre.

L’acier de Damas, est celui qui vient de Damas en Syrie, qui a un grain si fin, qu’il coupe le fer sans être trempé. On dit qu’un Cavalier qui le tient à la main, & qui fait le moulinet en courant, lui donne la trempe par la seule impression de l’air. On le trempe aussi sur un chamois mouillé, en passant le tranchant dessus, comme si on vouloit couper le chamois.

Acier tiré. Terme d’Horlogerie. C’est une verge d’acier passée par une filière cannelée, qui la rend propre à faire des pignons de différens membres, suivant la filière par où il a passé. Traité de l’Horlogerie par Thiout.

Une bille d’acier est une pièce d’acier qui a quatre ou cinq pouces de long, & deux ou trois lignes d’épaisseur. On envoie aussi de l’acier en barre, & d’autre en pains larges & plats, de différentes grandeurs & épaisseurs. Il n’y a point d’acier en Barbarie ; celui qu’ils emploient, est fait de fer qu’ils étendent en de longues verges, & qu’ils mettent dans des tinettes de terre, où ils lui donnent la trempe avec de l’eau, du sable & des herbes ; puis le font recuire, afin qu’il soit dur comme de l’acier : mais il n’est pas si bon que celui qu’on leur porte d’Europe. Marmol.

Acier, se dit poétiquement d’une épée. Un fin acier lui fit voler la tête de dessus les épaules. On l’a dit de même d’une lancette, dans une belle Ode sur le quinquina.

Le monstre, disoit-on, ne sauroit s’appaiser,
Qu’en recevant toujours de sanglans sacrifices.
Sous l’acier subtil & tranchant,
Le sang à grand flots s’épanchant,


L iij Ne