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régime. Le pécheur est dans un grand abandonnement, lors qu'il ne sent plus de remords.

Abandonnement est aussi un contrat maritime qui se fait lors qu'un Marchand, ou autre particulier, à qui appartiennent des marchandises chargées sur un vaisseau, les abandonne au profit de l'assureur.

ABANDONNER, verb. act. Laisser à l'abandon. Derelinquere, deserere. Dieu n'abandonne jamais les siens au besoin. On a abandonné cette ville au pillage. Il a abandonne le soin de son honneur. Dans les plaisirs on abandonne son cœur & son esprit, on se découvre tout entier. P. de Cl. c'est-à-dire, qu'on s'y montre avec moins de précaution, & c'est là qu'on connoît les mœurs & les inclinations des gens. Le mérite ne sert de rien quand il est abandonné de la fortune. [[sc|B. Rab.}} C'est le génie de l'erreur, qu'aussi-tôt qu'elle se sent pressée, elle reprend ce qu'elle avoit abandonné. Péliss.

☞ ABANDONNER. v. act. On dit qu'un pere a abandonné son fils ; qu'il l'a entiérement abandonné, pour dire, qu'il ne prend plus aucun soin de lui, qu'il ne s'en met plus en peine. On dit d'une femme qui se prostitue : C'est une femme qui s’abandonne à tout le monde. Acad. Fr.

Il signifie encore livrer en proie. La ville fut abandonnée à la fureur du Soldat. Elle n'ose abandonner son cœur à l'amour. M. Scud.

Abandonner au bras séculier, c'est Renvoyer un Ecclésiastique devant des Juges laiques, pour donner une Sentence de condamnation à peine afflictive sur un cas privilégié.

On le dit aussi de l'Inquisition. Lorsqu'elle a prononcé sur le crime d'hérésie, elle livre les coupables au bras séculier, parce que l'Eglise n'ayant point la puissance temporelle pour infliger la peine de mort, elle implore le secours du Juge temporel, qui ne manque point d'exécuter les Arrêts du saint Office. C'est ce qu'on appelle abandonner au bras séculier.

☞ En parlant de quelque chose à boire ou à manger, qu'on veut laisser à la discrétion des domestiques, après en avoir bû & mangé autant qu'on a voulu, on dit prov. & fig. Il faut l’abandonner au bras séculier. Acad. Fr.

On l'emploie avec le pronom personnel pour exprimer un homme qui est entraîné par ses passions, qui en est devenu l'esclave, qui s'y prostitue absolument. Tradere se, committere se. Quand les gens austères viennent à goûter les voluptés, alors la nature lasse des peines, s’abandonne aux premiers plaisirs qu'elle rencontre. S. Evr. Il s’abandonna à la tristesse & à son désespoir. Il s'est abandonné à la colère & à ses désirs. On dit aussi s’abandonner à la Providence, s’abandonner à la fortune, pour dire se confier à la Providence, à la fortune, & attendre tout de Dieu, ou du hazard & du bonheur. S’abandonner à la joie ; c'est-à-dire, en goûter tout le contentement, & en ressentir tous les plaisirs. S’abandonner à l'oisiveté ; c'est-à-dire, s'éloigner absolument de toutes les affaires, sans vouloir s'occuper d'aucun des exercices honnêtes de la vie. Il faut s’abandonner à son feu, & ne rien refuser de ce que l'imagination présente. Bouh. Il se trouvoit malheureux d'être abandonné à lui-même, & à ses propres pensées, sans avoir quelqu'un qui pût le plaindre, & lui donner de la force. P. de Cl. Il est plus sûr de s'arrêter à l'autorité de l'Église, que de s’abandonner aux foibles efforts de notre misérable raison. Nicol.

Abandonner, signifie encore, Quitter, jetter là. Abjicere. Il abandonna ses armes.

Abandonner, signifie encore, Quitter un lieu, en sortir. Deserere. Il a abandonné le Pays. On lui fit abandonner la Ville.

Abandonner, signifie encore, Laisser, donner. Dans une Traduction en Prose, où l'on abandonne tous les termes de la Langue au Traducteur, il demeure souvent au-dessous de l'Original. S. Evr. Je vous abandonne cette affaire, je vous en laisse le maître. Je vous abandonne à vous même & à votre propre conduite.

Abandonner, signifie encore, Exposer, commettre à. Abandonner quelqu'un à la haine publique. S’abandonner au danger de perdre la vie pour la Religion.

Abandonner, signifie aussi simplement, Quitter, laisser, renoncer à quelque profession ou à quelque personne. Abandonner une entreprise. Son crédit & sa réputation


l'ont abandonné. Les plus sages ne sont pas toujours maîtres d'eux-mêmes, & il y a des momens où leur discrétion les abandonne, c'est-à-dire, qu'elle les quitte, ensorte qu'ils se laissent aller à l'impatience de parler. Ce Marchand a abandonné le commerce. Ce Magistrat a abandonné les affaires pour vivre dans la retraite. Les personnes vaines abandonnent aux ames communes le mérite d'une vie suivie & commune. La Bruy.

Mainte veuve souvent fait la déchevelée,
Qui n'abandonne pas le soin du demeurant. La Font.

Dans ce sens il se dit de la résignation que nous faisons à Dieu de nous-mêmes & de tout ce qui nous touche. Il faut s’abandonner à la Providence, à la conduite, à la bonté de Dieu. Il abandonne tout à la Providence. Il a abandonné sa vie, son honneur, entre les mains de Dieu.

On dit en termes de Fauconnerie, Abandonner l'oiseau ; pour dire, le mettre libre en campagne, ou le congédier tout-à fait, & s'en défaire entierement.

On dit proverbialement, N’abandonnez pas les étriers ; pour dire, servez-vous bien des avantages que vous avez, ne les quittez point. Utere fortuna.

Abandonné, ée. part. pass. & adject. Derelictus, destitutus, permissus. Le mérite ne sert de rien quand il est abandonné de la fortune. B. Rab. Biens abandonnés. L'amitié généreuse court aux personnes abandonnées, pour essuyer leurs larmes. M. Esp. Il faut que vous soyez les plus abandonnés calomniateurs qui furent jamais. Pasch. En ce sens, il signifie, des gens déterminés, & qui ne gardent aucunes mesures pour noircir la réputation d'autrui.

On dit absolument au subst. C'est un abandonné ; pour dire, un homme perdu & débauché, qui ne donne point d'espérance de conversion. Corruptus, depravatus. On dit aussi une abandonnee ; pour dire une fille prostituée. Je ne veux point brûler pour une fille abandonnée. Mol.

On dit aussi Abandonné des Médecins ; pour dire, que la guérison de quelqu'un est désespérée. Un homme abandonné, signifie un homme sans appui & sans secours. Abandonné à son sens réprouvé. C'est une expression de l'Ecriture, pour désigner un homme qu'on laisse à ses égaremens, & à la perversité de son cœur. On ne doit pas attendre des lumières bien pures, de ceux que Dieu a abandonnés aux ténèbres inséparables des grands crimes. Nicol. On dit aussi, qu'une cause est abandonnée, pour dire, qu'elle est déplorable & insoutenable.

☞ ABANHI. s. m. Voyez Abanbo. C’est le nom que les Abissins donnent au Nil.

☞ ABANNAS. Voyez Abaunas.

☞ ABANO. Nom propre d'un village de l’État de Venise en Italie. Aponum, Aponus, Aquæ Aponi, Aquæ Patavinorum. C’est un lieu célébre dans l’antiquité par ses eaux. On les appelle aujourd’hui Bagni d’Abano, les bains d’Abano. Il y a des inscriptions anciennes qui en font mention. Rhodigin dans ses Var. Lect. L. XXX. C. 16. parle des effets de ses eaux. Cassiodore dans ses Var. Lect. L. II. rapporte une Lettre du Roi Théodoric sur le même sujet, c'est la 39e. Voyez encore Pignorius, De origine Patavii. Orsato dans son Histoire, Portenori della Felicitate di Padoua, C. 4. & pour les anciens, Pline, Hist. Nat. L. II. C. 103. Suétone dans Tibère, C. 14. Lucain de Bello Civili, L. VII. v. 192. Claudien Carm. XLIX. v. 90. Abano est à environ six milles de Padoue : Voyez le Comte Charles Sylvestri dans le Raccolta d'Opusculi, imprimé à Venise, Tom. VI. p. 353. & suiv. Ce nom ne se trouve qu'aux cas obliques dans les Anciens ; ainsi on ne sçauroit décider s'il faut dire en latin Aponum, comme M. le C. Sylvestri, ou Aponus comme les autres Modernes.

Suétone dit que Tibére allant en Illyrie, consulta l’oracle de Géryon, proche de Padoue, par l’ordre duquel, pour connoître l’avenir, il jetta des dez d’or dans la fontaine d’Abano, & que de son temps on voyoit encore ces dez au fond de l’eau. Théodoric la fit environner de murailles, comme nous l’apprend Cassiodore. Suétone la nomme Fons Apon. De Seine, dans son voyage d’Italie, dit qu’il y a une autre fontaine à Abano qui pétrifie tout ce que l’on met dedans.


ABANTÉENS.