Page:Trigault - Lettre du R P Trigaut escrite a ceux de la mesme Compagnie, 1609.djvu/14

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duquel les nautonniers ne s’accordoient pas ; car les aucuns l’appelloient les iſles de Martin Vaz, les autres les iſles de noſtre Dame d’Aouſt, noſtre Patron les nommoit l’iſle de l’Aſcenſion, d’autres aſſeuroient que c’eſtoit l’iſle de la Trinité. Ie vous eſcris ces choſes par le menu, pour autant que ie ſçay bien que pluſieurs d’entre vous confereront ce mien voyage auec les cartes Geographiques. Nous nauigeames doncques de là entre l’Orient & le Midy, & atteigniſmes l’eſleuation du Pole du Promontoire, qui eſt de 35. degrez & demy : mais gauchiſſans vn peu vers le Midy pour eſtre plus aſſeures, y eſtãs portez par les vents, nous arriuaſmes juſques au 38. & doublaſmes au commencement du mois de May le Promontoire ſans le voir, pour plus grande ſeureté, de maniere que nous flotions ſur la mer des Indes en vn autre nouueau monde. Ce que nous recogneuſmes à deux ſignes & indices qui ne manquẽt jamais : le premier eſt de certains paſſereaux grãds cõme de cygnes, leſquels par ce qu’ils ſont blancs par tout le corps & ont le bout des aiſles noires, il les nomment mangas de veludo, c’eſt à dire manches de velours. Ces oyſeaux ſont cõme des ſentinelles que Dieu a poſé en ces lieux là