Page:Trigault - Lettre du R P Trigaut escrite a ceux de la mesme Compagnie, 1609.djvu/25

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fait en Europe, ſerpentant de pluſieurs tours & recours pour eſtre à couuert des harquebuſades de la Citadelle. Il y auoit aupres vne Chapelle de S. Gabriel, dans laquelle ils dreſſent l’vn de leurs baſtillõs, & l’autre du coſté de la mer qu’ils baſtirent de ſacs pleins de ſables (car la terre de l’Iſle eſt ſablonneuſe) faiſant les ſacs du drap que les marchãds Portugais auoient laiſſez en leurs magazins, & arrachant des maiſons de la ville les portes & les feneſtres, les accommodoient du mieux qu’ils pouuoient à leur fabrique. Finalement ils s’auancerent ſi pres, qu’ils parloiẽt auec les Portugais, & les Portugais auec eux bien ſouuẽt. Leur plus grade aſſeurãce eſtoit de prendre la Citadelle par la ſoif, mais en icelle il y a vne bõne ciſterne en laquelle à raiſon des grãdes ſeichereſſes, il n’y auoit que fort peu d’eau, choſe qui affligeoit grandement les aſſiegez : mais ils furent diuinement ſecourus du Ciel, qui leur enuoya contre la ſaiſon du tẽps vne ſi grãde pluye, que la ciſterne trois jours durant regorgeoit d’eau de toutes parts, tant elle eſtoit pleine. I’ay dict cõtre la ſaiſon & l’ordinaire du temps, car en ces quartiers là, les vents & les pluyes gardent tellemẽt leurs ſaiſons, que c’eſt cõme vn miracle quãd le Ciel