Page:Trigault - Lettre du R P Trigaut escrite a ceux de la mesme Compagnie, 1609.djvu/32

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bien ſeigner, & faire les cheueux, quant au reſte du tout rien. Le Pere qui eſtoit noſtre ſuperieur, preſchoit toutes les feſtes : lequel apres m’auoir inuité ſouuent à ce faire à mon tour, enfin i’acquieſçay à ſa volonté, & à l’importunité de beaucoup d’autres, qui m’en preſſoient. Comme dõc ie m’eſtois preparé pour le Dimãche de Paſques fleuries, le Ciel qui ſe couuriſt ce jour là, deſtourna mes auditeurs par la pluye. Derechef auſſi le premier jour de May ie fus empeſché par la violence des vents. Du deſpuis eſtant ſemond de m’aquiter de ma promeſſe, i’eſchappois en leur diſant, qu’il ne falloit rien entreprendre cõtre le Ciel, ainſi que i’auois faict peu deuant. En fin ſi fus-je contrainct de ce faire : mais ce fuſt au chemin que nous fiſmes, deſpuis le Moſambic juſques à Goa, & le jour de ſainct Matthieu, auquel ie preſchay en Portugais. Ie ne parle point maintenant ſi ie fis bien ou mal, du moins quant à la langue ie n’appreſtay à rire à perſonne : pour vous dire qu’il n’y a pas tant de difficulté à apprendre les langues, que nos Peres quelque-fois s’imaginent. Quant à moy, ie parle pour le preſent beaucoup mieux Portugais, que Francois, ainſi que ie l’ay experimenté encores ce