Page:Trollope - Le Cousin Henry.djvu/116

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duisaient ses reproches sur une nature dont elle ne comprenait pas la fierté. « Il avait toute raison de s’attendre à ce que vous ne lui coûtiez pas un sou. On lui a dit mille fois que votre oncle vous assurerait d’amples moyens d’existence. Vous savez qu’on le lui a dit ?

— Oui, je le lui ai dit moi-même la dernière fois que je suis venue ici avant la mort de mon oncle Indefer.

— Et pourtant vous ne voulez rien faire pour le soulager ! Vous voulez refuser cet argent, quoiqu’il vous appartienne, et quand vous pourriez épouser demain M. Owen ! » Elle s’arrêta pour voir l’effet que produirait son éloquence.

« Je ne reconnais pas le droit de mon père, ni le vôtre à me presser d’épouser quelque homme que ce soit.

— Mais vous reconnaissez, je suppose, le droit que vous avez de tenir votre parole ? L’argent est là, vous n’avez qu’à le prendre.

— Vous voulez dire que je dois me reconnaître tenue par ma parole. Je n’hésite pas à le faire. J’ai dit à mon père que je ne voulais pas être un fardeau pour lui : je ne serai pas pour lui un fardeau. Il aura d’ailleurs compris que si je viole ma promesse en ce moment, c’est à cause d’une erreur de mon oncle Indefer, à laquelle je ne pouvais m’attendre.

— Vous violez votre promesse en ce que vous ne voulez pas accepter l’argent qui vous appartient.

— Je viole ma promesse ; cela suffit. Je sortirai de cette maison, où je ne serai plus un fardeau pour personne. Si seulement je savais où aller, je partirais dès demain.

— Tout cela est de la folie, » dit Mrs. Brodrick se levant en colère et sortant violemment de la chambre.