Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/687

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ils seraient toujours exempts du tiers de l’imposition taillable qui, suivant l’usage de la généralité de Limoges, tombe sur le propriétaire. Il faudrait donc rapporter ce tiers de l’imposition qu’ils auraient supportée, tant sur le bien des autres taillables qui acquittent le plein tarif, que sur la taxe même d’exploitation que supportent leurs colons. Cette déduction du tiers ne se borne pas même aux biens appartenant aux nobles. Ce tiers imposé sur le propriétaire, ne l’est que dans le lieu de son domicile ; s’il est domicilié dans une ville abonnée ou fixée, où la taille s’impose d’une manière beaucoup plus modérée et arbitrairement, il en éludera la plus grande partie, qui retombera à la charge des autres taillables. J’ai supposé que tous les biens des nobles étaient imposés à la taille d’exploitation. Le contraire est notoire : le plus grand nombre font valoir par eux-mêmes, en exemption, quelques domaines indépendamment de leurs prés, bois, vignes, clôtures, dont l’exemption est regardée par les officiers de l’élection comme une suite de l’exemption de taille personnelle[1]. Il y a de plus une grande partie de leurs biens imposés aux vingtièmes et qui ne sont en aucune manière susceptibles d’être imposés à la taille : ce sont les rentes seigneuriales,

  1. On lit à la suite d’un édit sur les tailles, du mois de juillet 1766, cette singulière clause d’enregistrement, apposée par la Cour des aides de Paris, le 4o septembre 1768 :

    « Registré, etc……… à la charge que, conformément aux intentions dudit seigneur roi, données à entendre par sa réponse du 17 août dernier, et à la jurisprudence constante de la Cour, la noblesse, le clergé et les officiers des cours seront conservés dans le droit, dont ils ont toujours joui et dû jouir, de ne pouvoir être imposés à la taille pour tous les biens qui leur appartiennent, de quelque nature qu’ils puissent être, que pour l’excédant des terres labourables qu’ils feraient labourer au delà de quatre charrues. »

    Il est clair, 1o qu’aux termes de cette jurisprudence, et en vertu de la règle : Qui dicit de uno, de altero negat, ni les parcs, ni les jardins, ni les prés, ni les bois, ni les vignes, non affermés, des ecclésiastiques, des nobles et des officiers des cours souveraines, ne pouvaient être assujettis à la taille ; qu’en outre la plus grande partie de leurs terres arables échappait également au même impôt.

    Du reste, la jurisprudence de la Cour des aides était, en effet, conforme aux lois sur la matière, et l’on en trouve la preuve dans l’édit même de 1766, dont l’article Ier étend encore à bien d’autres la prérogative rappelée dans la clause d’enregistrement.

    « Voulons et nous plaît », dit cet article, « que le clergé, la noblesse, les officiers de nos cours supérieures, ceux des bureaux des finances, nos secrétaires et officiers des grandes et petites chancelleries, pourvus des charges qui donnent la noblesse, jouissent seuls à l’avenir du privilège d’exemption de taille d’exploitation dans notre royaume, conformément aux règlements qui ont fixé l’étendue de ce