Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/148

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par bancs réguliers, car chacun pourrait sans peine se détourner pour travailler de son côté. Quant aux filons métalliques, comme ils n’ont qu’une direction et ordinairement qu’une épaisseur médiocre, il arriverait le plus souvent que, lorsque deux hommes se rencontreraient en suivant deux directions opposées, le filon se trouverait épuisé, et alors ils n’auraient rien à se disputer.

Mais supposons que deux hommes suivent chacun un filon, que ces deux filons soient convergents, et viennent, comme il arrive quelquefois, se réunir en un seul ; si les deux mineurs ne parviennent pas au point de réunion des deux filons dans le même moment, le premier arrivé, continuant de s’avancer, s’emparera de suite du filon, et les galeries qu’il aura poussées étant son ouvrage, lui appartiendront : le second, en arrivant, trouvera le filon consommé, et tout l’espace occupé par les galeries de son concurrent ; il n’aura par conséquent rien à prétendre.

Ils n’auraient un droit entièrement égal que dans le cas où ils parviendraient ensemble au point de la réunion des deux filons ; il faudrait alors ou qu’ils s’associassent, ou que l’un achetât le droit et les travaux de l’autre : s’ils ne s’accordaient pas, ils auraient besoin de juge ou plutôt d’arbitre ; mais cet arbitre n’aurait encore besoin que de la simple équité pour régler leurs prétentions d’après l’évaluation des travaux de l’un et de l’autre.

§ VIII. La propriété d’une mine n’entraîne point le droit de forcer le propriétaire du sol à permettre les ouvertures nécessaires pour en continuer l’exploitation. — Dans tout ceci le propriétaire de la superficie n’a aucun intérêt ; mais il n’est pas possible de pousser fort loin le travail des mines, ni même l’exploitation de certaines carrières, en suivant des galeries qui n’auraient qu’une seule ouverture : on est obligé de les multiplier pour diminuer les frais d’extraction des matières, pour procurer l’écoulement aux eaux qui noieraient les ouvrages ; enfin pour donner aux travailleurs les moyens de respirer, et pour dissiper, par la circulation de l’air, les exhalaisons nuisibles. Il y a des carrières qui, comme une grande partie de celles de plâtre et d’ardoises, exigent, pour être exploitées de la manière la plus avantageuse, que la superficie du terrain même soit détruite ; dans tous ces cas le mineur a besoin de recourir au propriétaire de la superficie, et de lui demander la permission de pratiquer des ouvertures dans son terrain.