Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/201

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ter du 15 mai prochain jusqu’au 1er août de la présente année, feront venir des grains de l’étranger, par terre, dans ses provinces d’Alsace et de Lorraine, et des Trois-Évêchés, 15 sous par quintal de froment et 12 sous par quintal de seigle ; lesquelles gratifications seront payées par les receveurs des fermes, dans les villes frontières de l’Alsace et de la Lorraine et des Trois-Évêchés, où les grains seront arrivés, sur les déclarations fournies par les négociants ou les voituriers, qui seront tenus d’y joindre les certificats des magistrats des lieux où le chargement aura été fait, pour constater que lesdits grains ont été chargés en pays étrangers, ensemble copie dûment certifiée des factures ; et seront lesdites déclarations vérifiées dans la même forme que pour le payement des droits de Sa Majesté.

II. Il sera tenu compte à l’adjudicataire des fermes du roi, sur le prix de son bail, du montant des sommes qu’il justifiera avoir été payées pour raison desdites gratifications.

III. Il sera payé, par quintal de farine de froment introduite dans lesdites provinces d’Alsace et de Lorraine, et des Trois-Évêchés, par terre, 18 sous, et 15 sous par quintal de farine de seigle.

IV. Ne pourront les propriétaires des grains étrangers introduits dans le royaume, ou leurs commissionnaires, après avoir reçu les gratifications portées aux articles I et III ci-dessus, les faire ressortir pour l’étranger, ni par eux-mêmes ni par personnes interposées, sans avoir restitué auparavant lesdites gratifications, sauf à les recevoir de nouveau dans une autre province où les grains seraient introduits, pourvu néanmoins qu’ils y rentrent dans l’époque ci-dessus prescrite.


Lettre du roi aux archevêques et évêques de son royaume. (10 mai 1775.)

Monsieur, vous êtes instruit du brigandage inouï qui s’est exercé sur les blés autour de la capitale, et presque sous mes yeux à Versailles, et qui semble menacer plusieurs provinces du royaume. S’il vient à s’approcher de votre diocèse ou à s’y introduire, je ne doute pas que vous n’y opposiez tous les obstacles que votre zèle, votre attachement à ma personne, et plus encore la religion sainte dont vous êtes le ministre, sauront vous suggérer. Le maintien de l’ordre public est une loi de l’évangile comme une loi de l’État, et tout ce qui le trouble est également criminel devant Dieu et devant les hommes.

J’ai pensé que, dans cette circonstance, il pourrait être utile que les curés de mon royaume fussent instruits des principes et des effets de ces émeutes, et c’est dans cette vue que j’ai fait dresser pour eux l’instruction que je vous envoie, et que vous aurez soin d’adresser à ceux de votre diocèse. Les connaissances qu’elle renferme, mises par eux sous les yeux des peuples, pourront les préserver de la sédition, et les empêcher d’en être les complices ou les victimes.