Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/337

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Par ces règlements, et notamment par ceux de 1586 cet 1604, tous les bois situés dans les six lieues comtoises de la ville de Salins,

    Majesté et l’esprit de justice qui l’anime, il ne vint un temps où les engagements les plus sacrés cesseraient d’être respectés.

    « Après s’être acquitté de l’obligation de vous faire connaître la vérité, sire, le profond respect de votre parlement le réduit au silence dans l’instant où Votre Majesté commande.

    « Dans un moment plus heureux, sa fidélité constante espère être écoutée lorsqu’elle implorera la justice et la bonté de Votre Majesté en faveur des premiers ordres du royaume, sa compassion en faveur du peuple, sa sagesse en faveur de l’État entier.

    « En cet instant, sire, à peine sommes-nous assez à nous-mêmes pour exprimer une faible partie de notre douleur.

    « Vous jugerez quelle en doit être l’étendue quand vous aurez vu se développer les pernicieux effets de tant d’innovations, également contraires à l’ordre public et à la constitution de l’État.

    « Votre Majesté saura gré pour lors à son parlement de sa persévérance à n’y prendre aucune part.

    « Elle reconnaîtra de quel côté se trouve un véritable attachement à sa personne sacrée, un zèle éclairé pour son service, un amour du bien général conforme aux vues de Votre Majesté.

    « Elle veut le bien du peuple, et quand l’expérience lui aura montré que des systèmes adoptés comme capables d’opérer le bien produisent le mal, elle se hâtera de les rejeter.

    « Puissent seulement les maux que nous prévoyons, sire, et que nous ne cesserons de vous exhorter à prévenir, ne pas jeter de si profondes racines, ne pas miner tellement les anciens fondements de l’État, qu’il ne devienne en quelque sorte impossible d’en arrêter et d’en réparer les ravages.

    « Il ne nous reste plus d’espoir que dans la prudence et dans l’équité de Votre Majesté. Pleins de la confiance qu’elle nous inspire, nous ne cesserons jamais de renouveler nos instances auprès d’elle, et nous osons nous flatter, sire, que Votre Majesté daignera rendre justice à la pureté de nos sentiments et à notre amour inviolable pour sa personne sacrée. »

    Son discours fini, M. le garde des sceaux, monté vers le roi, agenouillé à ses pieds pour prendre ses ordres, descendu, remis à sa place, assis et couvert, a dit :

    « Messieurs, le roi a jugé à propos de donner un édit portant suppression des corvées, et ordonne que les grandes routes seront faites et réparées à prix d’argent. Sa Majesté ordonne qu’il en soit fait lecture par le greffier en chef de son parlement, les portes ouvertes. »

    Les portes ayant été ouvertes, Me Paul-Charles Cardin Lebret, greffier en chef civil, s’est avancé jusqu’à la place de M. le garde des sceaux, à reçu de lui l’édit ; revenu à sa place, debout et découvert, en a fait la lecture.

    Ensuite M. le garde des sceaux a dit aux gens du roi qu’ils pouvaient parler.

    Aussitôt les gens du roi s’étant mis à genoux, M. le garde des sceaux leur a dit :

    « Le roi ordonne que vous vous leviez. »

    Eux levés, restés debout et découverts, Me Antoine-Louis Seguier, avocat dudit seigneur roi, portant la parole, a dit :

    « Sire, la puissance royale ne connaît d’autres bornes que celles qu’il lui plaît de se donner à elle-même. Votre Majesté croît devoir, en et moment, faire usage d’une autorité absolue. Quel que puisse être l’événement de l’exercice de ce pouvoir, l’édit dont nous venons d’entendre la lecture n’en sera pas moins, aux yeux de votre parlement, une nouvelle preuve de la bienfaisance du cœur de Votre Majesté.

    « Du haut de son trône, elle a daigné jeter un regard sur toutes les provinces de son royaume ; avec quelle douleur n’a-t-elle pas considéré l’affreuse situation des