Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/495

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gagner la maladie, et l’on purifiera toutes les étables suivant la méthode décrite dans l’instruction de M. Vicq-d’Azir.

Il est indispensable de mettre la plus grande exactitude et la plus grande fermeté dans l’exécution de ces ordres, et de vaincre, par toute la force de l’autorité, la résistance de ceux qui refuseraient de s’y prêter.

Le sacrifice des bestiaux attaqués, bien loin d’être onéreux aux propriétaires, leur devient très-avantageux, puisque, malgré les recettes multipliées qu’on a répandues de tous côtés, malgré les espérances illusoires dont une foule de charlatans ont flatté des paysans aveuglés, une expérience trop malheureuse a constaté qu’aucun remède connu n’avait pu triompher de cette maladie. Tous les soins des élèves des Écoles vétérinaires, ceux des plus habiles médecins du pays, ceux de M. Vicq-d’Azir, et les différentes tentatives qu’il a faites, n’ont servi qu’à constater cette triste vérité, qu’il n’y a contre cette maladie aucun remède sûr ; que, s’il n’est pas absolument impossible de sauver quelques individus, ce ne peut être que par un traitement commencé dès les premiers instants du mal, et suivi méthodiquement avec une attention dont il n’y a que les médecins les plus expérimentés qui soient capables ; qu’il serait insensé d’attendre ces soins assidus et réfléchis des personnes auxquelles sont nécessairement livrés les bestiaux des campagnes ; que les individus même qu’on sauverait, infecteraient, pendant la durée du traitement, d’autres animaux qu’on ne sauverait pas ; qu’avec les soins les plus constants, et en employant les remèdes les plus appropriés, l’on ne sauverait jamais un animal sur vingt, peut-être sur cinquante animaux attaqués ; que, quand on aurait une espérance raisonnable d’en sauver un sur trois, le propriétaire serait exactement indemnisé du sacrifice des bestiaux tués, en recevant le tiers de leur valeur, et que, si l’espérance est presque nulle, comme il n’est que trop notoire, le payement de ce tiers est un pur acte de bienfaisance du roi envers ses sujets.

Enfin, il n’y a d’armes contre cette contagion que de tuer et de séparer. Il serait indispensable de tuer tout ce qui est infecté pour sauver l’État entier, menacé d’un fléau destructeur. Combien ce sacrifice nécessaire ne doit-il pas devenir facile, quand le propriétaire y trouve encore son avantage ! Se relâcher sur cette précaution serait une condescendance funeste ; ce ne serait pas céder à une