Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/532

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toute espèce que ces formes d’impositions nécessitent. Ils souffrent infiniment plus par la diminution de leurs revenus qui en résulte, qu’ils ne l’auraient fait par une contribution régulière et proportionnée à leurs richesses, si les dépenses, les jouissances, le travail, le commerce, l’agriculture fussent restés libres et florissants.

Sans ajouter à la charge que portent actuellement la noblesse et le clergé, ou même en la diminuant un peu, mais surtout en soulageant beaucoup le peuple, il serait facile d’introduire une forme moins onéreuse et moins destructive pour remplacer les impositions dont les deux premiers ordres ne sont pas exempts, et dont la nature est nuisible à toute la nation, à la puissance de Votre Majesté, à l’affection qu’elle est en droit d’attendre de ses sujets, à la paix, à la tranquillité, à l’union qui doivent régner dans votre empire. C’est vraisemblablement un des travaux que le Ciel, dans sa bienfaisance, vous a réservés. Ce sera peut-être un but auquel vous désirerez parvenir dans la suite que de rendre votre royaume assez opulent, et votre trésor assez riche d’ailleurs, pour pouvoir remettre au peuple les impositions spéciales auxquelles il est actuellement assujetti, de manière qu’il ne reste plus pour les ordres supérieurs que des distinctions honorables ; et non des exemptions en matière d’argent, avilissantes aux yeux de la raison et du patriotisme pour ceux qui les réclament, avilissantes aux yeux des préjugés et de la vanité pour ceux qui en sont exclus ; onéreuses pour tous par la diminution des richesses de tous, et des moyens de les faire renaître, qu’on a trop enlevés jusqu’à présent aux classes laborieuses, dont les avances et les travaux fondent et peuvent seuls augmenter l’opulence de celles qui leur sont supérieures par le rang.

Il est dans le caractère de Votre Majesté de vouloir arriver à ce terme heureux et nécessaire par des faveurs faites au peuple, et non par des atteintes aux exemptions actuelles de la noblesse et du clergé. Cette disposition peut influer sur leur manière de participer pour le présent aux assemblées municipales.

D’abord, quant à leurs biens affermés et soumis par conséquent à la taille d’exploitation, ils sont dans la règle commune, et peuvent effectuer leurs déclarations et faire porter leur voix par le fermier même de ces biens, ou par tel autre procureur qu’ils voudront choisir : faculté qui ne peut être refusée à aucun propriétaire absent.

Ensuite, lorsqu’il s’agira de la répartition de l’espèce d’impôt