Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, II.djvu/535

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paroisse, il n’aura, fût-il du rang le plus distingué, que le quart d’une voix de citoyen dans cette paroisse, et sera obligé de le réunir avec trois autres quarts de voix civique pour nommer un fondé de pouvoir ayant voix complète.

Ceci paraîtra d’autant plus juste à Votre Majesté, qu’il faut considérer que, malgré les arrangements dont j’ai parlé plus haut, et qui peuvent être convenables pour ne pas porter atteinte aux privilèges actuels du clergé et de la noblesse, ce n’est point comme membres d’un ordre dans l’État, mais comme citoyens propriétaires de revenus terriens, que les gentilshommes et les ecclésiastiques font partie de l’assemblée municipale de leur paroisse. Ces assemblées ne sont point des États. Il est établi depuis longtemps qu’en toute municipalité à laquelle ont part des ecclésiastiques ou des nobles, ils n’y votent pas séparément comme ordres distincts, mais uniformément comme les premiers des citoyens notables. L’édit de 1764, qui est à cet égard la loi subsistante et celle qui constate les principes actuels, est essentiellement dans cet esprit. Il ordonne de recevoir un certain nombre de gentilshommes dans les assemblées de notables, et se garde bien de leur y donner un rôle séparé. Déroger à cette loi, qui n’a point excité de réclamation, ne serait pas raisonnable. Et il serait dangereux d’introduire, dans des assemblées faites pour être pacifiques et pour s’occuper d’objets relatifs à un intérêt commun très-évident, des divisions, des distinctions qui feraient bientôt disparaître l’esprit public sous la vanité particulière et la susceptibilité des corps ou des ordres.

Votre Majesté voulant traiter ses sujets comme ses enfants, on ne peut trop les accoutumer à se regarder en frères, et l’on ne doit pas craindre que le respect dû au rang des aînés, qui d’ailleurs ont pour eux les dignités et les richesses, se perde jamais. Il n’est pas moins grand dans les provinces qui n’ont point eu d’États depuis des siècles que dans celles qui les ont conservés, et de plus, ce n’est pas de ces derniers que nous nous occupons actuellement, mais des autres.

Le principal sujet des contestations actuelles, qui est la répartition des impôts, se trouvant jugé dans la forme que je propose à Votre Majesté, par la seule distribution des voix, et les assemblées étant peu nombreuses, il y a lieu de croire que leurs délibérations se feront assez unanimement. Il ne pourra s’y trouver diversité d’o-