Page:Un ancien diplomate.- L'esclavage en Afrique, 1890.djvu/131

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rible nécrose, semblait en partie momifié ; les bras et les jambes étaient réduits à l'état d’un squelette, les doigts des pieds desséchés, raccornis et tombés en partie, avaient l’aspect du cuir brûlé, et le corps présentait sur plusieurs points des taches de décomposition. J’eus toutes les peines du monde à forcer mes interprètes à lui parler, tant ils craignaient de gagner sa maladie. J’appris que cette malheureuse était la femme d’un chef de village, qu’elle était chassée de partout, et que personne ne voulait rien lui donner. J’envoyai chercher les gens de sa famille. Je leur dis que je n’entendais pas que cette femme restât ainsi à l’abandon et qu’il fallait l’emmener. « C’est bien, dirent-ils, nous allons le faire. » Comme ils s’éloignaient, je pensai à leur demander où ils allaient la conduire. « Mais, me dirent-ils, nous allons la jeter à la rivière ; que veux-tu que nous en fassions ? elle va bientôt mourir, personne ne veut la soigner. » Celui qui me donnait si froidement cette explication n’avait pas réfléchi qu’il se trouvait à la portée de mon pied, il s’en aperçut trop tard. Je lui déclarai que si quelqu’un touchait à cette malheureuse, je lui ferais suivre le même chemin, que je la prenais sous ma protection, et que je me chargeais de lui donner du feu et à boire.